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LE VIEUX TENES

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LE VIEUX TENES

 

Je n'ai pas trouvé grand-chose sur l'histoire du VIEUX TENES, sinon qu'en l'an 1302 (date très incertaine), des Andalous commencèrent la construction de "Ténès el Hadhar" appelée plus tard "Vieux Ténès" par les colons Français.

 

 

CARTE D'ETAT MAJOR

 

Carte-1-50.000-TENES-et-vieux-tenes.jpg

 

Situé sur la route "d'Orléansville", aujourd'hui "Chlef", le Vieux Ténès se trouve à environs 1 Km. de Ténès.

 

 

PHOTO AERIENNE

 

Vieux-Tenes-40.jpg

 

La ville a été construite sur un promontoire rocheux presque totalement entouré par l'oued Allalah dont les gorges sont très profondes comme le montre l'ombre portée dans l'oued au nord de la ville. Constituée comme une casbah, avec des rues très étroites où seuls les piétons et peut être un baudet pouvaient circuler. L'automobile de fait y était interdite. Constituée de maisons basses avec des courettes intérieures, la population était à l'époque, 100 % musulmane, à l'exception peut être des instituteurs s'ils bénéficiaient d'un logement de fonction, ce que je n'ai pas pu vérifier , l'accès à l'école nous ayant été refusé.

 

 

LA PLACE PRINCIPALE 

 

La-petite-place-a-l-entree-du-VIEUX-TENES.jpgCarte postale

 

Située à l'entrée du village elle n'était toutefois pas très vaste comme le montre cette très vieille carte postale. On y trouvait un café Maure où tous les jours, les anciens se prélassaient au soleil en consommant un thé ou un café. J'ai eu l'occasion à 2 ou 3 reprises d'y boire un café à la terrasse.

 

 

LA MOSQUEE 

 

La mosquée du Vieux TenésCollection Michel Fétiveau

 

Située sur le point haut du village, la mosquée domine la ville, elle est l'une des plus anciennes d'Algérie. Tous les jours, le muezzin appelait les fidèles à la prière.

 

 

IMPLANTATION DU 22ème R.I.

 

En mars 1957, le colonel Rieutord, décida d'implanter un poste au Vieux Ténès, et y détacha une unité de la CCS de Ténès, comptant en tout et pour tout 15 hommes.

 

 

NOTRE POSTE DANS LA VILLE

 

Notre-poste-au-VIEUX-TENES.jpgCarte postale

 

L'autorité militaire mit à notre disposition une petite école désaffectée, comprenant trois pièces, et un sous sol inhabitable, ainsi que de locaux vétustes ouvrant dans la cour. Le pignon du pavillon, et le mur de la cour donnant sur une placette, presque en vis-à-vis de la nouvelle école, seul bâtiment dans le village qui comportait un étage et qui dominait notre poste. On aperçoit très nettement le pignon et la cour du poste au centre de la photo.

 

 

NOTRE POSTE

 

Notre-poste-au-VIEUX-TENES-la-cour-et-ses-2-arbres.jpgExtrait d'une carte postale

 

Outre la description que j'en ai déjà faite, on voit sur cette photo, les deux arbres dans la cour qui nous apportaient une ombre bienfaisante, et à l'angle du pavillon, le lampadaire que nous avions remis en service, ainsi d'ailleurs que tous ceux du village. Toutefois celui-ci avait bénéficié d'un équipement complémentaire, un abat jour, constitué d'une grosse boite de conserve, posée à l'envers, de sorte que notre poste et les sentinelles se trouvent  la nuit dans l'obscurité.

 

 

LE DRAPEAU

 

Le-drapeau-au-VIEUX-TENES.jpgCollection Francis Barbé

 

Un mât avait été érigé sur la placette près de notre poste, et tous les jours, l'on procédait à la montée et à la descente des couleurs, sans toutefois utiliser le clairon.

 

 

NOTRE MISSION

 

Le-bureau-qui-me-servait-de-chambre-au-Vieux-Tenes.jpgCollection Roland Baudru

 

Je fus chargé de procéder au recensement de la population. Les rues et les maisons furent numérotées, et l'on établit une fiche par famille avec les noms prénoms et dates de naissance de tous les membres, dont un exemplaire était affiché à l'intérieur du pavillon sur la porte d'entrée, et un double classé au bureau. De même, une fiche individuelle fut créée pour tous les habitants de plus de quinze ans, et classée alphabétiquement au bureau.

Comme on le voit sur la photo, nous délivrions des laisser passer pour les personnes qui souhaitaient circuler dans le pays. De même nous leur apportions une aide pour établir des documents administratifs.

Le bureau était meublé très sommairement, une table et un banc bricolés avec des planches. Mon lit "picot" complétait l'ameublement.

Une grande pièce servait de dortoir pour le reste de la garnison.

Aucun barbelé ne fut déployé, ils nous étaient interdits, "il fallait pacifier".

 

 

NOTRE CONFORT

 

La 3ème pièce à l'étage nous servait de réfectoire. La nourriture nous était apportée tous les jours, y compris le café du matin, par un véhicule de la caserne de Ténès, et 3 fois par jour une équipe de 3 à 4 hommes en armes allait récupérer la nourriture à l'entrée du village sur la route d'Orléansville.

Cependant, par beau temps, et c'était presque tous les jours, nous nous installions pour prendre nos repas dans la cour.

 

 

A TABLE AU VIEUX TENES

 

A table au VIEUX TENESCollection Michel Fétiveau

 

A l'ombre bienfaisante d'un arbre, nous avions bricolé, trois bancs et une table rustique qui restaient à demeure dans la cour.

Douze à table, les trois autres, montaient la garde pour assurer notre sécurité, et c'est l'un d'eux qui a pris cette photo. Le jerrican d'eau était à portée de main, mais quelques bières amélioraient l'ordinaire. Tout venait de Ténès.

De plus nous avions aménagé une douche dans la cour, constituée d'un bidon métallique de 100 litres posé en plein soleil sur le palier de l'escalier d'accès à la cour, et sous ce palier d'une pomme de douche avec un robinet d'arrêt, quelques planches au sol, et le tout derrière une toile de tente pour protéger notre intimité.

Le confort était malgré tout très spartiate.

 

 

TENES

 

La-caserne-vue-de-la-route-d-Orleansville-1962.jpg

 

Du Vieux Ténès, nous apercevions la ville de Ténès, La porte d'Orléansville, les murs des fortifications de la ville au niveau de la caserne, l'église entre les arbres, et au loin le silo du port et la mer…… le rêve….!

 

 

L'OUED ALLALAH

 

Le-viaduc-sur-l-oued-Allalah.jpgCollection Michel Fétiveau

 

Cette photo prise du haut des murs de notre poste, montre l'une des rares rues qui aboutissaient directement au fond de l'oued. En toile de fond, le viaduc du chemin de fer construit sur un affluent de l'oued Allalah.

 

 

LES GORGES  DE TENES

 

Les gorges de TENES 03 1957Carte postale

 

Cette photo prise en amont du Vieux Ténès, nous donne une bonne idée de la profondeur des gorges de l'oued Allalah.

 

 

LE CONTACT AVEC LA POPULATION

 

on-sympathise-avec-la-population-au-Vieux-TENES--1957.jpgcollection Francis Barbé

 

Le moins que l'on puisse dire, nous n'étions pas reçus à bras ouverts par la population. Nous réussissions malgré tout à sympathiser avec les personnes âgées et les enfants, qui nous quémandaient tous les jours des friandises. De même j'avais été invité par des anciens combattants à prendre un café au "café maure" à l'entrée du village.

 

 

CHANGEMENT DE CANTONNEMENT

 

Les-harkis-dans-la-cour-de-la-Medersa-au-Vieux-Tenes.jpgCollection Mac Donald Bergua

 

Vraisemblablement pour des raisons de sécurité, le poste étant très imbriqué dans la médina, le colonel Lallemand commandant le 22ème R.I. décida courant 1958 de déplacer ce poste, et de l'implanter à nouveau dans une école "la médersa" située à l'entrée du Vieux Ténès.. Celle-ci fut réquisitionnée.

A nouveau une quinzaine de militaires du commando y furent affectés, les harkis qui figurent sur cette photo, continuèrent de loger avec leur famille dans la cité d'urgence près du pont de l'oued Allalah, en dessous des fortifications de la ville de Ténès et à proximité de la porte de Cherchell.

 

 

NOEL 1958 AU VIEUX TENES

 

Noel-1958-au-Vieux-Tenes-photo-BERGUA-Macdonald.jpgCollection Mac Donald Bergua

 

Les appelés fêtent noël à la Médersa du Vieux Ténès en sablant le champagne ou un mousseux. Il fallait bien décompresser, et les jours de fête s'y prêtaient.

 

 

ON SABLE LE CHAMPAGNE

 

On-sable-le-champagne-au-Vieux-Tenes-photo-M.BERGUA.jpgCollection Mac Donald Bergua

 

Et la fête se poursuivit dans la cour de la Médersa.

 

 

Je possède peu d'information sur la période 1958/1962 et d'avance je remercie les anciens du commando qui  me contacteront, pour compléter cet article.

 

 

 

                        Michel FETIVEAU.


CONSTRUCTION DU POSTE DE LALA OUDA

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CONSTRUCTION DU POSTE DE LALA OUDA

 

 

            Lors de mes recherches d'informations concernant la 1ère compagnie du 1/22ème RI, par l'intermédiaire du blog de Michel, j'ai fait la connaissance d'Edmond Courraly qui était "passé" par la maison forestière de Tighret, durant son séjour en AFN, dans les rangs de la 3ème compagnie.

 

            En effet, Edmond a séjourné à Tighret du 20 novembre au 14 décembre 1956. Il faisait partie d'une section qui a remplacé les "rappelés" qui y séjournaient. La maison forestière qui avait été brûlée précédemment par les fells, était dans un état lamentable, inhabitable, car rien n'avait été entrepris pour la restaurer. La relève s'en est chargée.

 

            Le second passage a eu lieu le 14/03/57, pour quelques jours, car son unité a été mutée rapidement à Messelmoun pour relever une section continuellement harcelée.

 

            Mais au cours de nos échanges, j'ai aussi appris qu'il avait participé à la construction du poste de Lala Ouda et qu'il possédait de nombreuses photos. Ce qui m'a donné des idées qu'il a acceptées.

 

sergent courraly 1      Le sergent Edmond Courraly à Lala Ouda.

 

NB: le nom de l'auteur sera toujours précisé. S'il ne l'est pas, c'est que la photo fait partie de la collection d'Edmond.

 

 

            Edmond Courraly a été incorporé au 93ème RI, au camp de frileuse proche de Beynes au fin fond de l'ancienne Seine et Oise le 3/05/56. Il y a fait ses classes et ses pelotons. Il est arrivé le 7/11/56 en Algérie avec le grade de sergent et a été affecté à Villebourg à la 3ème compagnie du 1/22 RI.

 

            Après Tighret, puis Messelmoun, on le retrouve à Dupleix et enfin à Tala Icorn.

 

            Le 3/12/57, il est affecté à Lala Ouda alors en construction. Il y restera jusqu'à sa libération. Il embarquera pour la France le 24/10/58 sur le "Ville d'Oran".

 

 

LALA OUDA

 

            DECISION

 

            Nous ignorons quel a été le motif de la construction de ce poste et à quelle date a été prise la décision. Il n'en demeure pas moins que l'embuscade qui a eu lieu le 28/02/57 sur la piste en face du poste n'a pas été sans influence.

 

            On peut penser qu'il était aussi destiné à surveiller et protéger une partie de piste particulièrement dangereuse.


piste-de-l-embuscade-de-bouyamene-photoE.COURRALY.jpg

 

 

            Futur site de Lala Ouda à l'endroit de stationnement de l'hélicoptère Sikorsky. Juste au-dessus, la ligne blanche horizontale marque la piste de Bouyamène à Dupleix, là où a eu lieu l'embuscade. Au fond, au centre, le djebel Nador et, à droite, le piton 908. Au premier plan, la piste descendant plein nord.

 

EMPLACEMENT

 

Le lieu tire son nom d'un mausolée, détruit par l'armée au lendemain de l'embuscade du 28/02/57, d'une sainte femme locale nommée Lala Ouda. Une piste reliait ce mausolée à la piste principale de Dupleix à Bouyamene.

 

Le-camp-de-Lala-Ouda-photo-E.COURRALY.jpg

 

Le poste de Lala Ouda en LY 15 B 73 était situé sur une ligne de crête, légèrement arrondie, proche de la piste principale Dupleix-Bouyamene (écrit parfois Bou Yamine car il ne s'agit que d'une transcription latine).

 

les-marabouts-de-lala-ouda-photo-Edmond-COURRALY.jpg

 

Une petite piste, celle du mausolée (?), mais carrossable menait du poste à la piste de Bouyamene à Dupleix distante d'environ 300 mètres. Une seconde montait du douar situé en contrebas, plein nord.

 

CARTE

 

LO carte OK

 

Piste de Bouyamene à Dupleix. Les ronds marquent l(emplacement des postes. Les 2 flèches sur la piste en LY 15 B 73 et C 64 désignent les positions extrêmes de l'embuscade du 28/02/57. Les petites étoiles matérialisent les "cibles" des tirs"préréglés" du mortier.

 

INSTALLATION

 

C'est la 3ème Compagnie du 1/22, en provenance de Villebourg, qui s'est installée à Lala Ouda entre octobre et novembre 1957. Au début, il ne s'agissait que d'un simple camp de toile: les marabouts. Les conditions de vie étaient rudes, c'est le moins qu'on puisse dire.

 

Photo-5-roulante.jpg

 

A gauche la roulante pour la popote et la citerne d'eau. Le problème, quand pour des raisons de sécurité évidente, on cantonne sur un point haut et isolé, c'est qu'il n'y a pas de source disponible. Il ne reste qu'une solution : "les citernes".

 

La-corvee-d-eau-a-LALA-OUDA-photo-Edmond-COURRALY.jpg      La corvée d'eau.

 

CONSTRUCTION

 

Les travaux ont été réalisés par les militaires en quelques semaines.

 

Photo-7-terrassiers.jpeg               Les "terrassiers" en plein effort, ou presque….

 

construction-lala-ouda-photo-Edmond-COURRALY.jpg

 

 

Le poste en cours de construction. Le baraquement au toit arrondi sera un magasin. A droite la petite piste qui permet de rejoindre la piste principale.

 

construction-de-lala-ouda-photo-Edmond-COURRALY.jpg

 

 

Sur le point haut, bien évidemment, la tour de garde abritant la radio. Le baraquement au pied est une future chambrée.

 

lala-ouda-photo-E.COURRALY.jpg

 

 

Les bâtiments terminés et la place d'armes en quelque sorte. Avec le blason du régiment au pied du mât des couleurs.

 

Lala-Ouda-photo-Edmond-COURRALY.jpg     Le poste de Lala Ouda terminé. Vue générale.

 

 

LE MORTIER

 

courraly-et-son-60.jpg     Le mortier de 60m/m, Edmond chef de pièce.

 

nettoyage-du-mortier-de-60-photo-Edmond-COURRALY.jpg

 

 

Mortier en position. Opération de nettoyage.

 

Photo-14-plan-de-tir.jpeg

 

 

Le "plan de tir". Une véritable "Pierre de Rosette" puisque les "cibles" sont déterminées en coordonnées "chasse" (les toutes nouvelles) et "Lambert" (les anciennes).

 

 

BENI HATTETA

 

l-ecole-de-Beni-Hatteta-photo-Christian-Gatt.jpg       Photo Christian Gatt

 

 

L'école a été construite à environ 1 km de Lala Ouda en LY 15 A 75. Elle a été inaugurée les 1er et 2 juin 1957. Un appelé faisait office d'instituteur. En quelque sorte le rôle humanitaire de l'Armée.

 

Les-garcon-de-l-ecole-de-BENI-ATTETA.jpg                photo Christian Gatt

 

 

L'instituteur et sa classe. Uniquement des garçons.

 

L-ecole-de-BENI-ATTETA-detruite-par-les-rebelles.jpg              Photo Christian Gatt

 

 

Cette école a été détruite par les fellaghas mais après le départ d'Edmond. Nous ne disposons donc pas d'informations concernant cet acte de vandalisme.

 

 

TALA ICORN

 

 

Poste de la 3ème Cie créé en juillet 1957 en LY 15 D 44 à un carrefour de piste avec une section (moitié Appelés / moitié Harkis). Edmond l'a rejoint en août 1957.

 

Photo-18-le-col-et-l-ecole.jpeg

 

 

Le col avec le carrefour de pistes qui a permis de situer le poste et une nouvelle école, le bâtiment blanc.

 

Photo-19-tente.jpeg

 

 

1ère installation classique : un marabout commun aux appelés et aux harkis.

 

 

Pour remplacer la tente, somme toute, des mechtas furent construites pour un peu plus de confort. Indéniablement, les conditions de vie se sont améliorées….

 

Photo-20-2e-log.jpeg

 

 

Et, en plein bled, une école a été créée. Edmond y a enseigné un temps.

 

Photo-21-les-enfants.jpeg

 

 

Les élèves, filles et garçons mélangés. Ce qui est déjà un progrès.

 

Photo 22 la classe

 

 

La classe unique en pleine étude. Installation sommaire. A remarquer, près de la cheminée, le P.M. du militaire instituteur. Il faut toujours être sur ses gardes. Quoique….

 

 

Edmond COURRALY pour les souvenirs et les photos & J.C PICOLET pour la mise en forme.

LA MORT D'UN GOUMIER

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LA MORT D'UN GOUMIER

 

1ère exaction rebelle dans le secteur de CAVAIGNAC

tenu par la 8ème Cie du II/22 RI.

 

Dimanche 7 octobre 1956.

 

Je me nomme Jacques B. Je suis aspirant et je suis arrivé à la 8ème Compagnie depuis le 1er octobre 1956. Je suis affecté en "doublon" d'un sous lieutenant "rappelé" qui commande la 4ème section de combat. Je m'habitue à mes fonctions de chef de section adjoint, bien conseillé par le sous lieutenant S…E. qui a l'expérience du commandement. Ce jour aucune activité extérieure n'avait été prévue pour notre compagnie et la journée promettait de se passer calmement. Le soleil était ardent et les troupes étaient au repos, sauf la section de garde.

Cavaignac-cafe-hotel-Montaron.jpgJe commençais l'écriture d'une lettre à ma famille, pour décrire la vie à CAVAIGNAC. Je voulais raconter ce que je voyais dans ce pays dont je découvrais le mode de vie très contrasté des autochtones, selon qu'ils sont d'origine Européenne (F.S.E.), ou de souche Musulmane (F.S.N.A.).

Au milieu de la matinée, les gendarmes dont la caserne est proche du cantonnement de la 8ème Cie, informent le Capitaine V…E. qu'un "goumier" a été enlevé par les "fellaghas", hier vendredi au début de la nuit près du marché de TALASSA.

C'est un frère de ce goumier qui a donné l'alerte, en venant à pied de son douar TALASSA, jusqu'à CAVAIGNAC, distant de 12 Kms environ. Il a raconté l'évènement comme cela :

Son frère "goumier" est arrivé vendredi pour passer sa permission dans sa famille. Dans la soirée, il a été enlevé par un groupe d'hommes. Ceux-ci l'ont entraîné en donnant un prétexte futile, vers la forêt proche qui domine le "gourbi" où vit sa famille.

Le samedi 6 octobre est le jour du marché de TALASSA. Le goumier n'y était pas présent, alors qu'il avait dit qu'il envisageait d'y aller. Midi arrivant et ne le voyant pas revenir, sa famille a craint que le pire ne lui soit arrivé.

Ce dimanche le goumier n'étant toujours pas rentré dans sa famille, son frère est venu signaler son enlèvement à la gendarmerie de CAVAIGNAC afin que les gendarmes entreprennent des recherches. Ceux-ci peu nombreux dans cette brigade ont demandé le concours des militaires de notre 8ème Cie du 22ème R.I.

C'est le Sous lieutenant S….E. qui est chargé par le capitaine d'accompagner les gendarmes et de se porter avec sa section, sur les lieux de la disparition du goumier. Le Sous lieutenant me demande de l'accompagner pour me mettre dans l'ambiance d'une opération où un accrochage avec les rebelles est toujours possible.

Les 4 véhicules de la compagnie sont disponibles mais il faut un petit délai pour trouver les chauffeurs et regrouper la 4ème section, car certains soldats étaient au foyer pensant avoir une journée de repos devant eux.

En attendant le départ, le sous lieutenant S….E. m'explique qu'un "goumier" est un soldat qui fait son service militaire dans un régiment de tirailleurs Algériens (R.T.A.)que l'on nomme aussi un "Goum". Il y a aussi des tirailleurs au MAROC, en TUNISIE, et au SENEGAL. Dans ces régiments l'encadrement par les officiers et les sous officiers est majoritairement d'origine Métropolitaine. Par contre les petits gradés et les hommes de troupe sont en majorité d'origine "maghrébine". Les régiments de Tirailleurs sont réputés pour leur grande discipline, leur ardeur au combat comme dans la légion étrangère. Contrairement aux "spahis" qui se déplacent et combattent à cheval, les tirailleurs sont des fantassins, c'est-à-dire des soldats qui combattent à pied.

Le Sous Lieutenant S…E. rassemble donc les gradés de sa section et j'assiste à son "briefing" pour préparer la section à sa mission. Il indique qu'il faudra être en tenue de combat avec casque léger et lourd, puisqu'il y a déplacement en véhicules. Chacun devra avoir "2 unités de feu" de munitions. La recherche sur place ne prendra que 3 heures environ de marche, donc on peut se charger en munitions. Mais ne pas oublier extrait-Cavaignac-Tarzout.jpgd'avoir un bidon d'eau entièrement rempli. Comme consigne particulière il faudra être en alerte, pendant la montée vers TALASSA, car la route sinueuse est dominée par des collines derrières lesquelles des "fellaghas" peuvent se cacher pour tirer des coups de feu isolés au passage du convoi.

En outre, la disparition alléguée peu avoir été inventée, pour obliger les militaires à se déplacer en convoi et les faire tomber dans une embuscade tendue par des fellaghas prêts au combat. La consigne consiste à être sur nos gardes depuis le départ jusqu'à l'arrivée au "souk".

Vers dix heures le petit convoi démarre. Le Half-track placé en tête ralenti la marche mais dans les autres véhicules les soldats sont aux aguets notamment ceux assis sur les banquettes latérales du camion G.M.C. dont je suis le chef de bord. Le déplacement du convoi est visible de loin. Comme il n'a pas plu depuis plusieurs semaines les véhicules dégagent une intense poussière que le vent chasse en direction des collines.

Arrivés au "souk" de TALASSA situé en bordure de la piste carrossable, nous sommes attendus par le frère du goumier. Celui-ci nous conduit à travers le bled, vers le gourbi où il vit. Ce gourbi est situé à 3 ou 4 centaines de mètres du souk de TALASSA. Nous marchons pendant une demi-heure, et arrivons à proximité du douar du goumier.

Tireur-FM-en-protection-photo-Edmond-Courraly.jpgLe Sous Lieutenant S…E. fait mettre les 2 fusils mitrailleurs en batterie sur une petite éminence, face à la forêt afin de protéger les 2 groupes de grenadiers voltigeurs de la section qui vont ratisser en ligne de part et d'autre des buttes où sont les fusils mitrailleurs. Ils vont ratisser pendant une longue heure le terrain entre la piste et la lisière de la forêt. Ce terrain n'est pas plat, mais légèrement vallonné, avec des ravines où les eaux ruissellent lorsqu'il pleut. Dans ces ravines des touffes de lauriers roses peuvent aisément dissimuler une personne. Le soleil presque au zénith commence à chauffer dur. Les soldats transpirent dans ce bled aride et les bidons d'eau sont vides.

Ratissage.jpgIl est près de midi. Les recherches n'ont données aucun résultat dans ce terrain "haché" par des talwegs peu profonds. Alors le sous lieutenant donne l'ordre de se rabattre vers les gourbis de la famille du goumier pour leur annoncer que les recherches ne peuvent se poursuivre et qu'il n'est pas possible avec le faible effectif présent, d'aller dans la forêt touffue car se serait trop risqué.

La famille du goumier est effondrée. Elle présume déjà du sort qu'aura subi son parent. Cependant le frère du goumier a poursuivi les recherches avec un autre membre de sa famille, près du terrain que nous avons déjà ratissé.

Après quelques palabres avec la famille du goumier le Sous lieutenant donne l'ordre de repartir vers les véhicules nous attendant sur la piste près du souk. Nous coupons au plus court dans ce terrain accidenté. Nous avons parcouru la moitié du chemin nous séparant de nos véhicules, lorsque nous entendons des "you-yous" stridents poussés par les femmes des gourbis que nous venons de quitter. Le Sous Lieutenant s'enquière de ce qui se passe. Le frère de la victime nous indique par gestes que le corps du goumier a été retrouvé dans une ravine descendant de la forêt.

Un groupe est chargé d'aller se rendre compte sur place tandis que l'autre groupe reste en protection. J'accompagne le Sous Lieutenant et nous constatons que le goumier gît, égorgé, dans le fond d'un talweg à sec. Il est encore vêtu avec ses habits civils traditionnels. Ses mains sont liées dans le dos avec son "chèche" dont il était coiffé lorsqu'il a été enlevé.

Il ne fait plus de doute que cet enlèvement est l'œuvre des "fellaghas" dont une bande se trouverait dans la forêt de TARZOUT peu éloignée de TALASSA. De la gorge tranchée d'une oreille à l'autre, (ce que l'on appelle ici le sourire KABYLE) les carotides ont laissé s'écouler un long filet de sang qui s'est répandu dans la ravine et a séché sur le sol où il s'est infiltré.

Nous avons sous les yeux l'exemple même de la barbarie des "fellaghas". C'est le sort qu'ils réservent aux traîtres. Ce goumier ayant répondu à l'appel sous les drapeaux dans un régiment de tirailleurs Algériens est considéré à tort, comme un collaborateur des Français : c'est un traître pour le F.L.N. Les fellaghas ont profité qu'il soit en permission donc sans défense, pour l'assassiner, car on ne peut pas appeler cet égorgement autrement qu'un crime.

Puisqu'il y a meurtre, la gendarmerie qui a suivi notre section de loin, est chargée de l'enquête et recueillera les témoignages de la famille et du chef de section. Ils ont obtenu ces quelques renseignements : Le goumier a été enlevé dans la nuit par 3 inconnus qui l'ont maltraité et ligoté avant de l'emmener. Cette affaire sera classée parmi les meurtres politiques.

L'exécution du goumier pouvant dater de ce matin très tôt et sa mort étant constatée, les hommes de sa famille veulent l'enterrer aussitôt selon la coutume musulmane. Depuis les gourbis on voit des hommes se munir de longues perches d'eucalyptus qui serviront de brancard pour transporter la victime.

Avant que le corps du goumier soit emporté, le Sous Lieutenant, fait mettre en ligne un groupe de soldats. Je suis en tête de ce groupe avec le sous lieutenant, puis suivent une dizaine de soldats de la section. S'agissant d'un militaire, le sous lieutenant estime tout à fait normal de rendre les honneurs à ce soldat Français, que l'on peut considérer comme "Mort au champ d'honneur" ayant été tué par des ennemis de la France. Au commandement du Sous Lieutenant : "Garde à vous"  -  "Présentez armes" pendant une minute  -  "Reposez Armes  - "Repos". A ces commandements le groupe s'est figé et je devine que chacun est stupéfait de la "barbarie" avec laquelle cette exécution a été réalisée pour frapper d'effroi les populations locales de ce douar. C'est une facette du terrorisme.

Les hommes ont apporté les longues perches et avec des couvertures de laine rustiques, ils ont confectionné un brancard sur lequel le corps du goumier est posé. Moment d'émotion intense devant le corps de cet homme, dont l'agonie consciente a certainement été un très pénible supplice.

Quatre hommes transportent le corps vers les mechtas en bordure de la forêt, où se trouve un espace réservé à l'inhumation des morts de ce douar. Si je n'avais pas vu le déroulement de l'inhumation, jamais je ne me serais rendu compte que cet espace est un cimetière musulman.

Un emplacement a été rapidement creusé sur 20 à 25 cm de profondeur dans ce sol dur; Le corps y a été placé tel que, puis recouvert avec la terre de l'excavation, formant un petit monticule allongé. Les hommes entourent celui-ci de pierres trouvées alentour. C'est tout.

Dans-le-djebel.jpgAutour de la tombe, je remarque maintenant d'autres monticules très aplatis, entourés de quelques pierres. Ce sont d'anciennes sépultures, car les corps décomposés ont affaissé le monticule de terre, qui ne dépasse plus beaucoup du sol environnant. Je saurais dorénavant reconnaître un cimetière musulman dans le djebel, ou près d'un marabout, car il faut avoir un œil exercé.

Les mœurs de ces gens autochtones sont encore moyenâgeuse, mais conviviales : Le frère du goumier pour remercier les militaires, tient à offrir le café. Nous ne refusons pas pour ne pas vexer ces gens frustres. Le frère du goumier, fait alors apporter le café par deux serviteurs : l'un d'eux porte le plateau en cuivre ciselé rutilant avec des verres pour nous deux et les gendarmes, l'autre tient à la main une énorme cafetière en métal argenté.

Avec le Sous Lieutenant, nous les regardons descendre jusqu'à nous par de petits sentiers à peine tracés, ils sont nu-pieds et malgré cela d'une vélocité et agilité sans égales. Le café nous est servi dans des petits verres très propres pour les gradés, les soldats étant servis dans leur quart en aluminium. Ce café est excellent, il me désaltère et me redonne des forces. Je reprends un deuxième verre avec plaisir. Nous n'en avons pas de si bon à la 8ème compagnie.

Mairie_de_CAVAIGNAC_avec_le_22_RI.thumb.jpgNotre mission étant achevée toute la section repart en silence vers les véhicules et nous revenons tristement à CAVAIGNAC, il est 14 heures.

Les officiers restés au cantonnement ont installé le Mess dans la salle des cartes, derrière la salle de classe de l'école des filles, car les "cuistots" de la section de service, ont préparé un repas amélioré. Le repas est bien avancé. Le Sous Lieutenant S…. E et moi, apprécions les mets qui nous sont servis, arrosés d'un vin provenant de la cave viticole de FROMENTIN. Ce vin rouge avec ses 14°5 d'alcool est très généreux et cela à l'effet d'un bon tonique sur notre moral, abattu après la pénible mission de ce matin.

L'après midi sera consacré au repos absolu. Il faut s'endurcir et effacer de sa mémoire les pénibles images du matin. La sieste dans la chambre tempérée, sera nécessaire pour cette thérapie.

Si cela continue, que pouvons nous faire pour protéger les populations isolées dans le bled ? Les rebelles ont le champ libre pour terroriser les "fellahs" qui ont tous dans leur famille des parents ayant participé aux deux guerres mondiales aux côtés des soldats français. Ceux-ci à n'en pas douter sont jusqu'à ce jour favorables au maintien de la présence française en Algérie. Mais par le terrorisme aveugle il est facile de leur faire changer d'opinion.

 

 

                                                                                                                                                                                                                               Jacques B.

L'EMBUSCADE DU 28 FEVRIER 1957

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L'EMBUSCADE DU 28 FEVRIER 1957

 

            Le 28 février 1957, vers 13h40, un convoi militaire ayant terminé sa mission de ravitaillement du poste de la 2ème compagnie du 1er bataillon du 22ème RI cantonnée à Bouyamène, lors de son retour, tombe dans une embuscade tendue par des HLL (hors la loi), quelques kilomètres avant Dupleix. Le bilan est très lourd en pertes de vies humaines, d'armes et de munitions, de matériel et de véhicules. Ce drame a marqué les esprits à jamais.

 

            Ayant servi au 1/22 quelques années plus tard en 1960/1961, cette embuscade a été évoquée devant moi à plusieurs reprises. Ce qui m'a amené à m'y intéresser.

 

            Après sélection, je dispose maintenant de plusieurs témoignages ou sources d'informations. Je vais les recouper afin de tenter de savoir ce qui s'est effectivement passé.

 

 

            LES SOURCES

 

            J'ai attribué un numéro d'ordre à chaque source afin de pouvoir facilement la citer en cas de besoin dans le texte de cet article.

 

            1)- Le JMO (Journal des Marches et Opérations) du 1/22 auquel est joint, chaque trimestre, l'ordre de Bataille reprenant les titulaires des postes hiérarchiques ainsi que diverses informations, notamment la liste nominative des morts et blessés. C'est un document militaire officiel, tenu au jour le jour, en style "télégraphique", pour les faits qui rythment la vie du bataillon. Il est absolument confidentiel et couvert par le "secret défense". Même actuellement le JMO du 1/22 n'est toujours pas dans le domaine public et ne peut être consulté que sur autorisation ministérielle. Je l'ai obtenue certainement parce que je figure, bien évidemment, sur les ordres de Bataille couvrant ma présence dans les rangs de ce bataillon.

 

            2)- Le compte rendu rédigé aussitôt après le drame par le commandant Cailhol, chef du 1er bataillon. Document lui aussi officiel et exceptionnellement joint en bonne place au JMO. Ce compte rendu a été publié, avec quelques variantes par le Dahra, journal de liaison du 22ème RI et repris sur le blog de Michel.

 

            3)- Le témoignage (écrit) de Max Dubos, Sous lieutenant de réserve au 586ème BT (Bataillon du Train) de Novi qui, lors d'une mission à Gouraya, a été "réquisitionné" pour se porter sur le lieu de l'embuscade afin de rechercher les blessés. Cet article a été publié sur le blog de Michel le 7/05/2010. Cet article a été repris par un blog algérien (Vitaminedz) le 6/04/2013.

 

            4)- Le témoignage (écrit) de Claude Rochard. Un appelé affecté à la 2ème compagnie cantonnée à Bouyamène. Il était en poste à Béni Bou Hanou. Un de ses amis et frère d'armes a été blessé mortellement dans l'embuscade. Il avait pris le convoi pour recevoir des soins dentaires à Dupleix. Cet article a été publié sur le blog de Michel le 17/03/2009. Ainsi qu'une fiche nécrologique concernant Guy B, un des tués.

 

            5)- Le témoignage (oral) d'Edmond Courraly. Un sous-officier du contingent. Non présent, affecté à la 3ème Compagnie au moment des faits. Il a rejoint fin 1957 le poste de Lala Ouda créé à proximité du lieu de l'embuscade, (voir l'article publié sur le blog de Michel le 21/11/2013).

 

            6)- Les commentaires d'Albert Roussel suite à des articles sur le Net (notamment wilaya4.chez.com/debat/contributions_1.htm)

 

            7)-Le témoignage oral de Raymond Guittard. Il faisait partie d'une section de la 2ème Compagnie en protection de la piste à quelques kilomètres au nord de Bouyamène. Ce sont les premiers secours arrivés sur le lieu de l'embuscade.

 

             NB: grâce à la mémoire d'Edmond Courraly, j'ai pu obtenir les coordonnées d'un Appelé rescapé de l'embuscade. Malheureusement, il n'a pas donné suite à ma démarche pour entrer en contact. C'est certes une énorme perte pour l'histoire mais sa position se comprend parfaitement. Il doit être particulièrement traumatisant de vivre avec de tels souvenirs. Je l'avais néanmoins approché car, il y a une bonne vingtaine d'années, il s'était spontanément confié à E.Courraly. Son nom est inconnu de RG (7). Il devait donc être affecté à la CCAS du 1/22 RI.

 

            8)- Aïssa Hakim. Au moment des faits, il avait une douzaine d'années. Il était berger et "chouf" (guetteur) pour le FLN. Son père en faisait partie. Il a vu à l'aller comme au retour des HLL de l'embuscade. Il a écrit divers articles qui ont été publiés notamment par le NouvelObs. (par ex.: aissa-hakim.over-blog.com/article-guerre-d-algerie-bataille-de-bouyamene-vue-croisee-berger-chouf-de-l-aln-et-soldat-colonial-118199545.html). J'ai déjà eu l'occasion de m'intéresser à certains de ses articles. Voir sur le blog de Michel "La double embuscade de Sadouna" publié le 4/11/2013.

 

            9)- Mohamed Chérif Ould el Hocine. Un ancien officier de l'ALN. Il a écrit une lettre ouverte à la gloire des "chouhada" (singulier chahid, martyr) publié sur plusieurs sites sur le Net et dans la presse algérienne (par ex: www.depechedekabylie.com/evenement/62336-hommage-aux-familles-de-nos-valeureux-chouada.html)

 

            10)- ML. Une enquête non (encore) publiée établie par un Algérien qui s'est rendu 5 fois sur le lieu de l'embuscade (la première en septembre 1962) et a rencontré des témoins et des participants à cette embuscade. Après publication de cet article le 10/10/2013, il a apporté d'autres précisions.

 

          LE LIEU DE L'EMBUSCADE

 

BY piste

 

            Le JMO du 1/22 ne précise pas quelles sont les coordonnées du lieu de l'embuscade. Ce n'était d'ailleurs pas l'habitude à l'époque. Il faut reconnaître que celles utilisées, les coordonnées "Lambert", n'étaient pas faciles d'emploi et surtout pas parlantes. Ce n'est qu'avec les nouvelles cartes d'état major de 1957, distribuées à compter de 1958, que l'on utilisa les nouvelles coordonnées "chasse" d'une grande simplicité. Elles apparaissent pour la première fois dans le JMO du 1/22 le 3 mai 1960 pour un "ratissage" en (LY) 05 G-H 60-70.

 

            L'Armée s'en tenait alors à des renseignements plutôt vagues : sur la piste de Bouyamène, à environ 6 km de Dupleix. Or, comme le montre la carte "reconstituée" ci-dessus, il existait 2 pistes reliant ces deux points. A 5 km environ au nord de Bouyamène, la piste se divise en deux, une fourche en LY 15 D 74 (le site sur lequel sera érigé le futur poste de Tala Icorn)  Mais on comprend pourquoi la branche "Est" ne fut certainement pas ou rarement empruntée car elle est très tortueuse donc plus longue et plus lente. Et de ce fait plus dangereuse. Nous nous en tiendrons donc dorénavant à la branche "ouest". A noter que c'est cette piste qui, après l'indépendance, élargie et goudronnée, a été transformée en route à usage "civil" de Dupleix à Carnot (D4 de la carte Michelin et CW 3 sur les cartes algériennes).

 

            Une précision importante est apportée par ML. (10). Il indique dans son enquête que la tête de l'embuscade se situait en face du mausolée d'une sainte femme locale dénommée Lala Ouda et donc du poste militaire édifié par la suite.

 

Or, de ce camp, érigé en octobre/novembre 1957, des photos du lieu de l'embuscade ont été prises par EC (5) après son affectation à la 3ème compagnie comme chef de pièce du mortier de 60m/m.

 

piste de l-embuscade de bouyamene photoE.COURRALY

 

Début de l'occupation des lieux du futur poste de Lala Ouda. La ligne blanche est celle de la piste de la tête de l'embuscade à la position du half-track sous le piton coté 908. Au centre le djebel Nador.

 

La photo ci-dessous est plutôt axée sur la tête de l'embuscade et le point coté 706 avec, en partie visible, la piste (certainement celle du mausolée) reliant le futur camp à la piste principale.

 

les marabouts de lala ouda photo Edmond COURRALY

 

Ce qui nous permet d'affirmer que l'embuscade s'est tenue entre le carreau "chasse" LY 15 B 73 (position du scout car) et le LY 15 C 64 (position du half-track).

 

 

          LES FORCES EN PRESENCE

 

            22ème R.I.

 

            L'élément en mission faisait partie de la CCAS (Compagnie de Commandement d'Appui et de Services) du PC du Bataillon installé à Gouraya. Un convoi de ravitaillement de 15 véhicules dont 2 blindés (un scout-car et un half-track). (1) comme il y avait au moins une jeep, le nombre de GMC se limiterait donc à 12.

 

            Le chef de convoi est le capitaine Louis B. commandant de la CCAS. Le sous-lieutenant Roger C. est le chef de la section d'appui. Au retour, l'effectif est de 58 combattants dont certain de la 2ème Cie, parmi lesquels des permissionnaires. (1) Nous y reviendrons.

 

            Pour les différents intervenants, la composition du convoi est pratiquement celle du JMO. A l'exception d'un seul, celui de l'ancien officier de l'ALN (9) qui, à au moins à deux reprises, dont dans la dépêche de "Kabylie" du 1er/11/2008, parle de plusieurs dizaines de véhicules et de camions. Nous aurons l'occasion d'en reparler lors du bilan.

 

ALN (Armée de Libération Nationale)

          branche armée du FLN

 

De nombreux articles indiquent un chiffre de 35 HLL ayant participé à cette embuscade. Or, on constate que tous ont été écrit par AH (8), le "petit berger". En fait, il se réfère au nombre de combattant qui se sont reposés et sustentés chez ses parents à l'aller comme au retour. Mais, il se trouvait, comme il l'écrit, à une dizaine de kilomètres du lieu de l'embuscade. Il n'a donc vu que les forces locales, le commando zonal commandé par son favori Mohamed Hanoufi, de son nom de guerre Abdelhaq. Que l'ex officier (9) appelle d'ailleurs Ahmed Noufi, alias Si Abdelhak.

 

En tout état de cause, un convoi d'une quinzaine de véhicules, avec les distances de sécurité, dépasse nettement 500 mètres en longueur. Pour le couvrir, avec 35 hommes, il faudrait en placer un au moins tous les 15 m. Ce qui serait totalement inopérant. Une simple escarmouche.

 

Mais si Abdelhak est bien l'instigateur de cette embuscade, il a dû obtenir l'accord du capitaine Slimane, alias Siakha, responsable politique et militaire de la zone et surtout l'appui de Ait Maâmar, alias Si Yahia, commandant le bataillon commando de la Willaya IV (9 & 10) fort de 350 hommes (9). Bataillon qui par pur hasard était dans le secteur pour se reposer et se reconstituer.

 

D'autres sources donnent des chiffres moindres mais néanmoins importants. Pour le Dr Mohamed Taguia, ancien haut responsable de la Wilaya IV, l'effectif était de 180 (cité par AH (8) qui d'ailleurs conteste ce chiffre). Pour ML (10) il était de 250. Pour l'affirmer, il se base sur le nombre de postes de combat aménagés pour l'embuscade. Ces postes étaient encore visibles sur le terrain en 1962. Ils ne l'étaient plus en 1970 suite à l'élargissement de la piste, devenue route goudronnée.

 

On peut donc affirmer que les fellaghas étaient en supériorité numérique dans la proportion d'au moins 4  (voir 5) contre 1.

 

De tels chiffres ne sont pas surprenants. A l'époque l'ALN disposait encore d'unités importantes puisqu'elle contrôlait une bonne partie du territoire. Mais elles furent aussi sa perte. Les grandes opérations du "Plan Challe" menée de février 1959 à septembre 1961 les ont laminés voire exterminées. Et en 1960, il ne restait plus une katiba (compagnie) complète dans toute la Wilaya IV. Le FLN avait perdu la guerre sur le terrain.

 

Pourtant, il a maintenu des petits groupes pour entretenir l'insécurité, obligeant ainsi l'Armée Française à poursuivre son "quadrillage" donc à utiliser des Appelés et d'autant plus que les effectifs étaient en baisse suite à la mobilisation de 1939. Il est indéniable qu'il pariait sur la lassitude des Français. Il voulait gagner sur le tapis vert. Et, il faut le reconnaître, il a réussi avec les prétendus accords d'Evian.

 

LES PREPARATIFS

 

C'est donc l'adjudant Abdelhak, chef du commando zonal qui sans contestation possible a été l'investigateur et le concepteur de l'embuscade. Sans aucun doute avec l'aide de ses "choufs", il a pris conscience de la régularité d'un convoi organisé pour ravitailler, à partir de Dupleix, le camp de la 2ème compagnie à Bouyamene. Il a donc fait soigneusement observer.

 

Tous les jeudis un convoi d'une quinzaine de véhicules dont 2 blindés quittait Dupleix, en fin de matinée vers 11h30 pour Bouyamene. Le retour s'effectuait en début d'après midi, après le repas, pour regagner sa base. Toujours par la même piste. L'exemple type de ce qu'il ne faut pas faire. D'ailleurs les habitudes, la routine, sont critiquées dans toutes les écoles militaires avec juste raison d'ailleurs. Oui, mais comment se comporter autrement dans un tel cas. On ne peut varier que les jours et les heures. Est-ce suffisant ?

 

Cet adjudant n'était pas sans expérience puisqu'il aurait participé à l'embuscade de Palestro le 18/05/1956. Ce qui lui a permis de concevoir un plan que nous détaillerons par la suite.

 

Il avait même envisagé une tentative 2 mois plus tôt en s'associant avec un autre commando zonal dirigé par Souleimane Tayeb, alias Zoubir. Combattant d'expérience s'il en est puisqu'il avait réussi l'embuscade de Sidi Franco (quartier de Marceau) le 9/01/1957 tendue à un convoi du 3ème bataillon du 22ème RI. Une opération prémonitoire avec des chiffres légèrement inférieurs à ceux de Bouyamene. 12 véhicules, 42 militaires, 27 tués dont 1 gendarme, 14 blessés ayant survécu. Mais le commando avait été transféré dans la région de Blida (9). Où Zoubir a péri le 22/02/1957 dans un accrochage à Sbaghnia.

 

Abdelhak avait donc besoin d'aide. Comme nous l'avons vu, il l'a obtenue de ses interlocuteurs mais pas sans une forte réticence. Qui se manifesta à nouveau sur le terrain le matin même de l'embuscade lors du passage du convoi qui, par sa taille, impressionna Siakha et Yahia qui voulurent se retirer. Abdelhak les menaça alors de la réaliser seul. Ce qui aurait été un échec qui aurait rejailli sur les partants et les auraient déshonorés. Sous la pression de la "troupe", ils restèrent (8 & 9).

 

Et c'est vrai, Abdelhak avait vu juste. Le convoi avait de nombreux points faibles comme nous le verrons par la suite. Par contre, j'ai été étonné que, parmi les Algériens, aucun n'ait rapporté un point essentiel de la tactique de l'ALN dans ce domaine. Pourtant AM (8) l'avait évoqué dans ses articles à propos de la prétendue double embuscade de Sadouna. Cette règle d'or voulait qu'il ne faut pas tendre une embuscade si elle doit se réaliser plus d'une heure avant le coucher du soleil. Ceci pour empêcher, avec la nuit, tout convoi de transport de troupes, l'intervention de la "chasse" aérienne et même l'héliportage de commando de chasse. Et Dieu sait qu'elle est la distance que l'on peut parcourir en 10 heures quand on a le diable aux trousses. Et que le terrain a été préalablement reconnu pour éviter les fortes dénivelées. De 20 km au moins.

 

Or pour Bouyamene, Abdelhak y dérogeait. Mais il faut reconnaître que, à l'époque le "quadrillage" dans ce secteur était encore en phase d'application. Le  djebel n'était toujours pas complètement tenu. Si Bouyamene était en place, Bou Zérou ne l'était pas encore. Les regroupements étaient en cours et les GAD plutôt rares. Et les procédures d'urgence n'étaient pas encore parfaitement rodées. Le "maillage" du filet était encore large et nos adversaires en profitaient.

 

L'ARMEMENT

 

ALN

 

Aucun des Algériens ne cite de chiffres précis. Mais ce qui est important, c'est que les HLL disposaient d'une mitrailleuse de 30 (7,62 m/m) et d'un FM 24/29, des PM, des fusils de guerre et de chasse qui peuvent être redoutables dans une embuscade lorsque l'on utilise des chevrotines qui ne sont pas de fabrication locale et quantité de grenades. Comme il s'agissait d'unités d'élite, tous les combattants devaient être armés. Par contre, s'ils utilisaient des porteurs ceux-ci ne l'étaient pas.

 

Les armes étaient celles récupérées dans des embuscades. Les meilleurs outils revenaient aux bons ouvriers. Ainsi les armes récupérées à Sidi Franco étaient sur place. Et même d'autres provenant du stock dérobé par l'aspirant Maillot lors de sa désertion.

 

Le commandant Cailhol le signale, in fine, dans son récit de l'embuscade publié par le Dahra (2). Mais cela pouvait passer pour une clause de style. Cette assertion est pourtant confirmée par des anciens HLL.  ML (10).

 

1/22ème RI

 

L'armement du convoi est traditionnel. Je n'insisterais donc pas. Néanmoins, je voudrais m'arrêter sur deux points : les blindés et l'avion.

 

Les blindés sont des blindés légers, un half-track et un scout-car. Si le premier est connu, il était couramment utilisé en AFN, il n'en est pas de même pour le second. C'est un véhicule à 4 roues qui fait l'unanimité contre lui. Fabriqué par les USA avant la seconde guerre mondiale, il était déjà obsolète quelques années plus tard. Les US l'ont fourgué en masse aux soviétiques. Il a pourtant été utilisé en Indochine et en AFN.

 

scoutjp6.JEPG

 

C'était initialement un transport de troupe. Son blindage était trop faible et trop bas n'offrant aucune protection à son équipage et notamment au conducteur qui ne disposait que d'une cabine ouverte. En plus son moteur avait des capacités réduites compte tenu du poids. Et il n'avait pas de porte arrière. Pas facile de s'en extraire rapidement.

 

Les 2 blindés étaient équipés d'une mitrailleuse de 50 (12,7) et de 30 (7,62).

 

 

Morane Saulnier est un constructeur aéronautique qui depuis 1910 s'est spécialisé dans les avions entoilés pour l'observation, l'entraînement et les liaisons. Pendant la 2ème guerre mondiale, il a été contraint de produire pour l'occupant des appareils similaires mais avec une voilure métallique, le Fieseler Fi 156 Storch (cigogne). A la libération, il en a produit une réplique, le Morane MS 500 Criquet.

 

morane 500

 

C'était un avion lent, sans aucune protection et non armé. Certains modèles ont néanmoins été équipés d'une mitrailleuse MAC type 34 de 7,5 m/m sur le côté gauche à la place de la vitre arrière du cockpit qui ne pouvait tirer que vers l'arrière de l'appareil. Mais il n'est pas certain que cet avion armé ait été utilisé fréquemment en AFN.

 

Un témoignage ML (10) signale que, au retour, un camion civil avec deux personnes à bord, faisait partie du convoi. Sans autre précision. On ne sait pas ce qu'il est devenu. Mais c'est plausible. Je l'ai connu à Bou Zérou et je sais que cela se pratiquait à Bouyamene. Des pick-up transportant du charbon de bois pour le marché de Gouraya. Ils circulaient en queue de convoi.

 

LE TERRAIN

 

Avant toute chose, il faut préciser que la piste de Bouyamene à Dupleix était pour l'essentiel de son parcours, une piste de djebel. Ce qui signifie qu'elle a été tracée au bulldozer à flan de montagne. Donc d'un côté le vide et de l'autre le talus qui peut surplomber la piste de plusieurs mètres. En outre c'est une piste à voie unique absolument sans "passing place", comme en Ecosse dans les Highlands, pour se croiser. Pour la bonne raison que l'on ne se croise jamais. Et il est  impensable de croiser un véhicule civil puisque l'on est en zone "interdite".

 

Ce qui veut dire que dans un convoi, aucun véhicule ne peut changer de place.

 

BY lieu

Portion de piste sur laquelle a eu lieu l'embuscade. Les triangles noirs indiquent le début de l'embuscade et sa fin supposée. L'étoile noire représente l'emplacement des armes collectives des HLL. Les positions des blindés sont notées, ainsi que le champ de vision du half-track. Cette portion de piste représente environ 1km.

 

La carte ci-dessus est une carte récente agrandie, établie à partir de photos satellites. Elle s'intègre parfaitement, à échelle réduite, dans la carte d'état major ci-dessus. Le douar de Bihita (en haut à gauche) est de construction récente, après l'indépendance. Il est situé entre l'ancien poste de Lala Ouda et l'école de Béni Hattéta dont il a dû reprendre l'ensemble des installations encore existantes.

 

Le choix du lieu de l'embuscade est particulièrement judicieux pour ne pas dire remarquable. Il se situe approximativement à mi-parcours donc donne le temps le plus long pour les interventions locales que l'on peut estimer à 25/30 minutes. Un seul défaut, mais auquel on peut remédier facilement, le convoi sera en pente descendante. Il roulera donc plus vite qu'à la montée, d'où une plus grande difficulté pour atteindre les chauffeurs. Et notamment celui du premier véhicule. Or, selon les consignes militaires, si un convoi est attaqué, les chauffeurs doivent accélérer pour se dégager au plus vite de la zone dangereuse. L'erreur n'est donc pas permise pour les rebelles.

 

La partie de piste sous l'embuscade est pratiquement en ligne droite parfaitement observable puisqu'en descente; Un point fort puisque les armes collectives sont rares. Placées en tête, elles pourront en cas de besoin couvrir toute la piste. En plus, le secteur est désert donc offre le maximum de discrétion lors des travaux préparatoires puisqu'il fallait creuser des postes de combat, plus de 250 a-t-on dit, ainsi qu'une tranchée pour cacher les armes récupérées et camoufler l'ensemble. Ces travaux durèrent 2 jours et furent exécutés, volontairement ou sous la contrainte, par la population des douars proches. ML (10).

 

La partie de piste retenue ne comporte pas d'échappatoire. D'un côté le ravin en pente raide. De l'autre le talus, recouvert de broussailles denses, plutôt élevé, ce qui interdit pratiquement toute contre-attaque des occupants des véhicules alors qu'ils seront tirés à vue à faible distance, sur le même plan et bien souvent dominés.

 

Emplacement de l embuscade du 28 2 57

 

Cette photo prise par ML (10) nous montre la piste à la tête de l'embuscade, après avoir été transformée en route goudronnée. Elle a été élargie en mordant sur le djebel, ce qui a eu comme conséquence d'élever le haut du talus. Elle n'est donc pas très parlante.

 

La photo suivante (de Pierre Jamin) n'a pas été prise sur la piste de Dupleix à Bouyamène mais elle est très représentative de l'état des pistes qui se présentaient ainsi dans une multitude de cas en AFN. Il est donc aisé de se rendre compte de leur dangerosité. Les occupants de ces véhicules ne voient absolument rien. Ils pouvaient à tout moment tomber dans une embuscade ou même être la cible d'un tireur isolé, voire recevoir une grenade. On risquait donc sa vie en permanence !

 

 Convoi de ravitaillement pour AZIEM photo Pierre JANIN

Convoi de ravitaillement du poste d'Arziem Secteur de Marceau (3ème bataillon)

 

La tête de l'embuscade est placée à l'entrée du premier virage d'une suite de lacets qui obligeront les véhicules à ralentir. Ce qui donnera le maximum de facilité aux tireurs embusqués. Mais il fallait une parfaite synchronisation des tirs pour que la surprise soit totale et la riposte faible. Pratiquement tous les chauffeurs devaient être abattus en même temps pour bloquer les véhicules quand ils ne tombent pas dans le ravin. Et du même coup, on pouvait éliminer au moins 25% des forces adverses ce qui est loin d'être négligeable en pareille circonstance.

 

LE CHOC

 

Le 28 février 1957 au matin, les forces rebelles devaient être à pied d'œuvre car il est impensable qu'elles se soient déplacées de jour au risque de se faire repérer par une patrouille. Et chacun devait avoir gagné son poste de combat, bien camouflé pour ne pas être découvert par le Morane d'accompagnement. Le convoi à la montée a donc été observé discrètement un peu avant midi. C'est d'ailleurs à ce moment là que Siakha et Yahia, impressionnés, décidèrent de se retirer. Mais il n'en fut rien.

 

Vers 13h40, le Morane tournant au dessus du convoi au retour entrait dans la nasse. Le tireur du FM toucha l'avion qui s'écrasa sur la pente du Djebel Nador tandis que deux coups de fusils de chasse donnaient le signal de l'attaque. Le scout-car fut stoppé et boucha la piste. Le capitaine Lucien B. fut tué net dans sa jeep derrière et ainsi de suite. Tout le convoi s'immobilisa dans un déluge de feu, 4 GMC basculant dans le ravin. Avec leurs occupants.

 

Et il fallait faire vite. Les rebelles passèrent à l'attaque en tirant et balançant des grenades. Le combat se termina au corps à corps, y compris à l'arme blanche (2 & 3). L'objectif était de récupérer le maximum d'armes et de matériel et même treillis et pataugas, ceux-ci fort recherchés car introuvables dans le commerce puisque la vente en était interdite en Algérie. Ceci en vertu d'un vieux principe édicté par l'Emir Abd el-Kader et repris par le Dr Mohamed Téguia dont nous avons déjà parlé. Qui a écrit : "Il s'agit de profiter de l'effet de surprise, de frapper vite et de se diluer dans la nature en emportant le plus d'armes possibles. L'engagement doit être bref, la durée n'excédant pas 15/20 minutes". Le principe de la razzia.

 

Mais les emplacements de tir prévus ne devaient pas être adaptés pour répondre à la longueur du convoi et la puissance de feu mal répartie. Les 3 derniers GMC ne furent pas touchés, ils ne pouvaient être que dans la courbe la plus courte au sud (voir carte ci-dessus) sinon le half-track se serait avancé jusqu'au virage suivant pour ajuster ses tirs. Et au milieu du convoi, quelques militaires résistèrent aux assauts.

 

Pourtant c'est le half-track avec le sous-lieutenant Roger C. qui évita que le désastre soit total. Suite à un incident technique, ce blindé quitta Bouyamène avec un léger retard. Il déboucha donc dans le dernier virage alors que l'embuscade battait son plein. En position dominante du fait de la pente, le sous-lieutenant ne perdit pas ses esprits et ouvrit le feu de ses deux mitrailleuses, servant lui-même la 12,7, en tirant notamment sur la tête de  l'embuscade et le scout-car qui avait en ligne de mire plusieurs GMC du convoi (2).

 

Un groupe de rebelles tenta d'enlever la queue du convoi mais ils échouèrent. Sur ce, toute l'embuscade se dispersa. L'opération n'avait pas duré un quart d'heure. . La règle avait été respectée. Et quelques minutes plus tard le premier élément de la 2ème   compagnie arrivait en renfort. Immédiatement suivi par un deuxième de la 3ème compagnie. Ils ne purent que se porter au secours des blessés.

 

LE BILAN

 

Le bilan de l'embuscade est lourd. Très lourd. On déplore 27 tués auquel il faut ajouter le pilote du Morane  + 2 blessés qui sont décédés dans les jours qui ont suivi + le prisonnier dont le corps fut retrouvé le 13/03/57 près du lieu de l'embuscade, soit un total de 31 hommes. Sans oublier 13 blessés  qui ont survécu (2) + le copilote du Morane.

 

Les pertes en armes, matériels et équipements ne le furent pas moins. On dénombre : 2 mitrailleuses de 30 dont celle du scout-car (je ne vois pas d’où peut provenir la seconde. Du Morane s'il était armé ? Mais alors c'était une 7, (et ne concernait pas le 1/22. (Mystère), 14 PM, 6 Garands , 2 carabines US dont celle du capitaine, 2 PA, 1 poste radio SDR 300, 2 postes radio SCR 536, 4 gilets pare-balle et 1 manchon lance grenade. (2). Ne sont pas dénombrés les treillis et les Pataugas qui furent arrachés aux morts et dans certains cas enfilés immédiatement.

 

Il est bien évident qu'un tel trésor de guerre n'a pas pu être emporté par une troupe fatiguée, éprouvée, comptant des morts et des blessés qui devait fuir rapidement pour ne pas se faire accrocher. Tout fut donc enfoui sur place dans une tranchée préparée à l'avance. ML (10) en a vu la trace en 1962.

 

L'armée perdit également 4 GMC, tombés dans le ravin. ML (10) affirme avoir vu en 1962 les carcasses des 4 véhicules au fond du ravin. Ce qui est démenti par EC (5) qui, une semaine après l'embuscade, a participé à une fouille du terrain pour récupérer le matériel qui aurait pu être oublié. Et il n'y a pas vu d'épaves de GMC. ML, confirme les avoir vus en 1962 à 250/300 m en contre bas de la piste, dans un endroit difficile d'accès, très boisé et brousailleux. Il n'en demeure pas moins que ces 4 GMC sont bien tombés dans le ravin et qu'il ne devait pas être facile de les extraire.

 

Sur le blog de Michel figurent 2 photos strictement identiques dont celle ci-dessous, mais les légendes sont différentes. L'une (de Claude Rochard) est liée directement à l'embuscade, mais la seconde (de Daniel Boulay) est présentée comme une simple sortie de piste. Alors qui croire .

 

Embuscade Dupleix Bouyamène Lalla Aouda 28 février 1957

 

Dès le début de l'embuscade, l'avion d'observation, un MS 500, a été abattu par le tir du FM. Il s'est écrasé sur le Djebel Nador.

 

Carcasse-du-piper-abattu-le-28-02-1957-photo-A-ROUSSEL.jpeg

 

Ce fait a été immortalisé par une photo d'Albert Roussel (6), photo qui figure dans un des albums du blog de Michel. Mais cette photo nous interpelle.

 

Nous savons par le sous-lieutenant Max D. (3) qui a retrouvé l'avion  que le pilote était décédé, à sa place, mais sans que nous sachions s'il a été tué par balle ou en se scratchant. Par contre le copilote n'était que blessé et s'était caché dans des buissons à l'arrivée des fellaghas. On peut donc en déduire que le choc n'a pas été trop brutal.

 

Sur la photo nous remarquons que le point  de chute est dégagé alors que les pentes du Djebel Nador sont broussailleuses. AR (6) précise que sa photo a été prise quelques jours après l'embuscade alors que les débris de l'avion avaient été regroupés au lieu dit Lala Ouda. Ce que confirme EC (5) avec la photo ci-dessous. Lors de la création du poste de Lala Ouda, les débris étaient toujours là. ML (10) affirme les avoir vu en 1989 mais sans en préciser l'endroit. Sur son dernier memo, il a ajouté que ne subsistait à l'emplacement du crash, et encore aujourd'hui, qu'une partie de la carlingue, les ailes et le train d'atterrissage avaient disparu. Ce qui est parfaitement concordant.

 

avion

                       Les harkis de Lala Ouda avec, au premier plan, des débris du Morane

 

Bien évidemment, nous ne développerons pas le témoignage (9) qui rapporte que des dizaines de véhicules ont été détruit, tous les soldats tués et des centaines de fusils de guerre, des PM, des FM récupérés. Il en est qui n'ont pas peur du ridicule…..

 

Quant aux rebelles, nous ne savons que peu de choses sur leurs pertes. Le témoignage d'un "rescapé" aurait été d'une grande importance (7). Ce qui est certain, c'est que Abdelhak a été tué alors qu'il essayait de récupérer la 12,7 du scout-car. Un autre homme, tué à son côté, a aussi été identifié.

 

Le CR (2) indique 9 tués, 2 prisonniers et un fusil de chasse récupéré ce qui peut être sujet à caution. MD (3) ne parle que d'un fellagha mort sur la piste. Sur le CR joint au JMO, il est précisé que "le sous-lieutenant Roger C. a vu lui-même des HLL ramenant des morts et des blessés sur les pentes dominant la piste. Seuls les rebelles abattus sur celle-ci sont restés". (1). Ce qui reste bien vague.

 

Quant à lui, RG (7) signale avoir vu 7 HLL morts sur la piste.

 

Mais on peut affirmer que les rebelles se sont repliés en emportant leurs morts et blessés; (10) signale une dizaine de blessés chargés sur des brèles et 2 tués dont les corps n'ont pas été retrouvés dans la forêt. (10) En tout état de cause leurs pertes furent minimes.

 

Et il est reconnu que c'est l'arrivé inopinée du half-track qui précipita l'ordre de décrochage.

 

LE PRISONNIER

 

Effectivement, il y eu bien un prisonnier, le soldat René B. C'est indiscutable ? On se demande bien pourquoi d'ailleurs car les rebelles n'avaient pas de camp du moins en Algérie. Etait-ce un trophée à présenter comme dans un triomphe romain ? AH (8) nous relate longuement son martyr. Car il est évident que libéré, il pouvait identifier ceux qui l'avaient emmené et signaler tous ceux qui avaient aidés les fellaghas d'où des arrestations avec tout ce qui peut en découler. Il était donc condamné.

 

Siakha qui avait pris le commandement du commando d'Abdelhak l'a présenté comme celui qui avait abattu ce chef vénéré. Et l'a condamné à être lapidé. Certains ont critiqué cette torture et ont plaidé pour une mort rapide et, si on peut parler ainsi, honorable. Dont le frère de AM. Ce qui lui a valu d'être lui aussi exécuté, par pendaison.

 

Je pense que ce témoignage peut être retenu car si AH (8) est sans concession envers la "puissance coloniale", il n'attaque jamais la France en tant que Nation. Et il n'est pas tendre, c'est le moins que l'on puisse dire, envers les autorités Algériennes qu'ils considèrent comme ceux  qui ont goulûment mangé les marrons retirés du feu par les moudjahiddines.

 

Un point pourtant m'étonne dans son récit. Le commando zonal, à 10 Km à vol d'oiseau du lieu de l'embuscade, c'est AH qui l'a écrit, prend le temps de déguster un couscous préparé par la mère de l'auteur. Alors même que tous savent que tout le secteur va grouiller de militaires français. Une sacrée dose de confiance dans leur bonne étoile. A croire qu'ils se considèrent comme invincibles après leur coup de main. Oui, vraiment étonnant….

 

Le prisonnier aurait été exécuté le 3 mars et sa dépouille retrouvée le 13 près du lieu de l'embuscade. Certainement pour éviter tout rapprochement avec le lieu de son supplice et même le chemin parcouru.

 

LES PERMISSIONNAIRES

 

On a beaucoup parlé de ces permissionnaires présents dans le convoi et sans armes comme le voulait la coutume. Le capitaine Assémat, dans un article publié dans le n° 228 d'Historia Magazine, et repris sur le blog de Michel le 04/12/2008, y consacre un entrefilet, mais parlant, "Un convoi de permissionnaires était tombé dans une embuscade (….) Les hommes désarmés n'avaient pas pu se défendre" (dixit). Une façon de gloser sur les rebelles à la victoire facile donc sans gloire. C'est aller un peu vite en besogne. D'autant que, après le premier feu, les survivants, malheureusement, ne devaient pas manquer d'armes.

 

Ce n'était pas un convoi de permissionnaires mais des permissionnaires dans un convoi. Nuance. Et combien étaient-ils ? Là encore, la version d'un témoin oculaire (7) aurait été d'un grand apport. Mais cela n'enlève rien à la victoire des fellaghas. Ils n'y sont pour rien. Ils ont profité des circonstances. Et un point de droit bien connu dit que "nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes".

 

Une précision a été apportée par RG (7). La 2ème compagnie en poste à Bouyamène a eu 13 tués. L'adjudant-chef G. qui partait en retraite, des permissionnaires dont certains libérables, un soldat autorisé à rejoindre sa famille en métropole pour assister aux obsèques de son frère, et ce malheureux enfin autorisé à se rendre à Dupleix pour des soins dentaires. Ce qui est énorme puisque représentant presque la moitié des tués. Par contre, il ne se rappelle pas du nombre des blessés.

 

Et, en tout état de cause, compte tenu des résultats prévisibles du premier feu, malheureusement, les armes disponibles ne devaient pas manquer. Donc une polémique qui n'a pas raison d'être.

 

LA REACTION

 

Alertée par les appels de détresse du convoi et vraisemblablement les détonations, une section de la 3ème Compagnie avec le capitaine la commandant, se précipita sur les lieux de l'embuscade. Le temps a été estimé à 15/20 minutes elle était sur place pour dégager les survivants en faisant fuir les HLL. c'est, du moins, la version officielle.(2)

 

Cela paraît peu. Surtout en début d'après midi. Comme il ne devait pas y avoir de section en alerte, ce ne doit pas être aisé de rassembler en un temps record des hommes en armes et des chauffeurs. En outre la piste pour se rendre à Lala Ouda (environ 6/7 km) est accidentée, tortueuse avec une forte montée sur la fin. Et pour des raisons de sécurité, il faut abandonner les véhicules quelques centaines de mètres avant le lieu de l'embuscade et terminer à pied.

 

La réalité est autre. Les premiers arrivés sur l'embuscade appartenaient à la 2ème Compagnie  de Bouyamène. Nous avons le témoignage de RG (7). A chaque convoi de ravitaillement, un élément de la 2 prenait à pied position sur la piste en protection. Ce jour-là, RG y participait pour la première fois. C'était une section renforcée, d'une quarantaine d'hommes, commandée par le sous lieutenant K. Vers 10 heures, ils s'étaient installés fortuitement à 5/800 mètres du lieu de l'embuscade, soit vraisemblablement en LY 15 C 53. Ce qui est confirmé par RG qui ignore cependant si c'était le lieu habituel.

 

Soit dit en passant, RG n'a pas vu de camion civil dans le convoi. Ni durant toute sa faction. Il aurait donc dû utiliser la piste avant son arrivée. Ce qui n'aurait rien de surprenant. Il existait un négoge de charbon de bois avec un point d'entreposage sur la piste pour faciliter le ramassage. Un camion civil l'effectuait mais hors convoi, sans aucune crainte. Ce qui n'est pas sans poser des questions...

 

Pour sa part, ML (10) confirme la présence du camion, un Berliet, en fin de convoi. Il a eu l'occasion de parler avec le chauffeur lors de son enquête sur place.

 

Alertée par la fusillade, en se gardant, la section s'est portée sur le lieu de l'embuscade. Les fells avaient déjà disparu. RG évalue le temps d'approche à une quinzaine de minutes. Il ajoute que juste après eux, un élément de la 3ème Cie s'est pointé à l'autre extrémité de la piste. Il en a déduit qu'il s'agissait d'une autre section également en protection de la piste en aval. Je partage son avis car aucun renfort même en état d'alerte, chauffeur au volant, moteurs tournant, hommes en armes à bord, ne pouvait arriver de Dupleix sur les lieux à 6/7 km, en ce temps record.

 

Et cela confirmerait les propos de EC (5) qui a déclaré que la 3ème Cie assurait la protection de la piste à chaque convoi. Il en a fait partie. Mais pas ce jour-là car il était absent de Dupleix.

 

Ainsi quand les renforts arrivèrent sur place, les rebelles avaient disparu. Ils furent confrontés à une scène d'apocalypse. Ils se consacrèrent donc à la recherche des blessés, à leur donner les premiers soins et à les hospitaliser, jusqu'à l'hôpital Maillot à Alger pour les plus gravement atteints. Les morts furent rassemblés et chargés sur les GMC encore en état de rouler. Comme les chauffeurs figuraient parmi les premières victimes, tous ceux titulaires d'un permis civil, même de VL, le devinrent.

 

Les corps furent rapatriés à Dupleix et préparés par des civils, des pieds noirs, avant la pise en bière.

 

Toute la région fut mise en état d'alerte et de nombreuses embuscades tendues. En vain car le secteur était encore "ouvert". Et les commandos héliportés n'arrivèrent que vers 18h/18h30. Le bouclage et le ratissage ne purent débuter que le lendemain matin au petit jour. Les rebelles étaient loin. Ils avaient définitivement gagné leur pari.

 

Le bataillon commando éclata en plusieurs unités pour regagner chacune sa base arrière. Qui dans la région de Marceau, qui vers Ténès, qui enfin, pour la plus importante équipe, en direction de l'Ouarsenis. Ce qui peut être considéré comme certain, c'est qu'aucun des participants à l'embuscade n'a été intercepté durant son repli. (10)

 

La conclusion du Compte Rendu du commandant Cailhol publié dans le Dahra diffère de l'original. Il est question d'une soixantaine de rebelles abattus. Un discours de circonstance pour remonter le moral des troupes. D'ailleurs, c'est le conditionnel qui a été utilisé : "plus de soixante rebelles réguliers auraient été abattus grâce au courage des nôtres".

 

Néanmoins, une énigme demeure. Aucun document officiel ne mentionne l'intervention de la chasse aérienne, ni dans l'heure qui a suivi l'embuscade ni par la suite. Pourtant en cas de coup dur, elle intervenait rapidement et efficacement. Mais a-t-elle été demandée ? Certainement car le contraire m'étonnerait. Le mauvais temps l'a-t-elle empêchée ? Mais pas le 28, car RG souligne un "bel après midi". Parmi ceux qui furent sur le terrain, personne ne s'en souvient.

 

Et pourtant les fells ne se cachaient pas. Le lendemain matin, une patrouille, moins d'une section, du 1/22ème RI a observé un élément rebelle avec mulets, certainement le plus lent, du côté de Beni Boilou (??). Nous ne savons rien de cette position. Mais ce témoignage de Roger Pierre Coureau, un entrefilet publié dans le N° 499 de l'Ancien d'Algérie, confirme l'utilisation de mulets que seul ML (10) a signalé.

 

Bien évidemment les populations locales subirent la vengeance des militaires même si les cadavres n'avaient pas été mutilés. Peut être parce que les rebelles manquèrent de temps. Il est question d'une répression parfois féroce avec tout son contexte d'arrestations arbitraires, de tortures, d'exécutions sommaires, de mechtas incendiées. Le mausolée de Lala Ouda fut même détruit ML (10). Même si le trait paraît parfois outrancier, nous aurions tendance à accréditer ce témoignage qui vise surtout les troupes sénégalaises sans négliger quelques éléments parachutistes et du 22ème RI.

 

S'il faut satisfaire un esprit de vengeance, sachez que Slimane/Sikha et Maâmar/Yahia ont trouvé la mort dans les violents combats de Sidi Madani près de Tamesguida, entre Blida et Médéa, le 15/04/1957.

 

CONCLUSION

 

L'embuscade du 28/02/1957 fut un désastre pour le 22ème RI. Le résultat de "mauvaises"  habitudes répétitives. Mais elles étaient difficiles à éviter. Maintenant nous savons par des témoins que le risque avait bien été pris en compte puisque la piste était protégée. Même si nous pensons que c'était insuffisant. Il semble que les 2 compagnies agissaient chacune séparément, sans aucune coordination. Et si la piste était protégée, elle n'était pas "ouverte" car une partie n'était pas reconnue. Et pas des moindres. C'est peut être la raison pour laquelle cela n'a pas été noté dans le compte rendu (2)

 

Nous ignorons quelle était la répartition habituelle des blindés dans le convoi puisque ce jour-là le half-track a connu un petit incident technique au départ. Mais sa place en dernière position n'était peut-être pas la plus judicieuse. Sur une telle piste, le blindé en fin de convoi ne pourra jamais le remonter. Et si une 12,7, voire une 7,62 ont une portée utile qui dépasse les 1000 mètres, à cette distance, elles manquent notoirement de précision. En fait, elles arrosent et gênent plutôt qu'elles ne repoussent. Même si dans le cas présent, la 12,7 aurait tué 2 rebelles dont un des chefs. Ce dont AR (6) n'est pas persuadé. A sa connaissance, rien ne le prouve. Il n'en reste pas moins que le résultat est là !

 

La piste était très dangereuse compte tenu de sa configuration. En conséquence, ledit jour, le convoi n'était pas suffisamment protégé du fait de sa longueur. Compte tenu du nombre d'hommes par véhicule elle manquait de puissance de feu pour espérer pouvoir repousser l'adversaire par ses propres moyens. Il manquait impérativement une section de protection qui aurait été répartie sur deux véhicules espacés.

 

Il a été dit que le capitaine B aurait été informé par le Morane d'une présence suspecte sur le lieu de l'embuscade et qu'il aurait répondu "je fais armer". Mais trop tard. Ce furent certainement ses dernières paroles.

 

 

Pendant de longues semaines, les convois de Bouyamène furent stoppés et remplacés par des parachutages effectués par des Nord-Atlas. Mais cela ne réglait pas un problème majeur pour le moral de la troupe : l'acheminement du courrier. Pour l'arrivée, il faisait partie du parachutage et toute opportunité était saisie. Un jour, c'est un T6 qui a largué le sac. Mais au départ, les occasions étaient rares. Seuls les hélicos de personnalités pouvaient être utilisés. C'était bien peu...

 

Juste après l'embuscade, le bruit a couru dans le secteur qu'une information avait été communiquée à Dupleix comme quoi les fells avaient aménagé des postes de combat et qu'il fallait prendre des précautions. AR (6) en a eu connaissance. Mais il est difficile de savoir si ce fait est exact ou s'il s'agit d'une simple rumeur résultant du traumatisme qui a suivi le drame. Mais cela traduit la crainte, voir la peur, que les hommes du convoi éprouvaient lorsqu'ils circulaient sur cette piste

 

A noter que, lors de mon séjour en 1960/1961, les "grandes opérations" ayant nettoyé le terrain, Bouyamène comme Bou Zérou, les 2 compagnies du djebel assuraient leur ravitaillement avec leurs propres véhicules et leurs hommes en protection.

 

Cette embuscade, comme celle de Tizi Franco du 09/01/1957, et d'autres qui suivirent,  accréditèrent la mauvaise réputation du 22ème RI, le régiment ayant connu le plus de pertes en AFN.

 

A ce propos, je me rappelle ma "sortie" de Cherchell. Les postes offerts étaient inscrits sur un tableau. Chaque EOR dans l'ordre de sortie choisissait son affectation. Etant PMS j'avais la possibilité de tirer une double affectation car n'ayant pas effectué de CI, étant ADL, je pouvais revenir en métropole pour former les jeunes recrues. Bien classé j'ai pu choisir l'affectation que je briguais : 22ème RI à Ténès puis 93ème RI à Courbevoie alors même que, mon service terminé, je reprenais mon poste civil sur Paris.

 

Mon choix fait, descendant de l'estrade, un capitaine présent m'a murmuré à l'oreille : "Vous avez choisi le régiment le plus décoré à titre posthume". Je me rappelle encore cette réflexion comme si c'était hier. Je ne l'oublierai jamais.

 

 

                                               J-C PICOLET

DES TIRS DE NUIT A BREIRA ET BENI-AKIL

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DES TIRS DE NUIT A BREIRA ET A BENI-AKIL

 

Un article intitulé "Une attaque des mines de Breira et de Beni-Akil, a déjà été publié sur le blog le 14 février 2013. Il s'agissait de la reproduction d'un article de presse de l'époque signalant les faits.

Maurice MOUTERDE qui se trouvait en poste en 1956 à BREIRA, nous relate ci-après les faits.

 

Attaque sur les mines de Breira et Beni-Akil

 dans la nuit du 2 au 3  Octobre 1956

 

Sous-lieutenant rappelé  à la 6ème compagnie du II / 22ème R.I., en poste à Breira du 24 septembre au 19 octobre 1956 je peux apporter quelques précisions sur cette affaire car j’ai conservé le Compte rendu que j’en ai fait.

Je dois préciser que ces deux mines ne sont distantes, si mes souvenirs sont exacts que de quelques kilomètres.

Carte-1-50.000-Port-BREIRA--redecoupee-2.jpg                                     Cliquez sur la carte pour l'agrandir

A Breira il y a 2 sections de la 6ème compagnie du II / 22 RI. Au début 2 sections de rappelés puis à compter du 30 septembre une section de rappelés et une section de jeunes recrues arrivés de Métropole (Bugeaud) aux ordres du sergent-chef Capeau. A Beni Akil c’est une section des G.M.P.R. (Groupe mobile de Police Rurale) qui assure la protection. L’ensemble constitue un sous-quartier dont j’ai la responsabilité du 30 septembre au 19 octobre 1956.

Avant cette nuit du 2 au 3 octobre différentes actions des fellaghas ont eu lieu. Le 27 septembre un pylône supportant le télébenne qui permet de descendre à Port Breira (Francis Garnier) le minerai extrait des mines et de monter le ravitaillement pour la troupe, a été dynamité dans la nuit, mais réparé le jour même. Le 1er octobre une petite fusillade a lieu de nuit à Beni-Akil.

Voici mon C.R. en ce qui concerne la nuit du 2 au 3 Octobre : "Au cours de la nuit du 2 au 3 octobre, les rebelles ont attaqué le poste de G.M.P.R. des mines de Beni-Akil vers 0h20. Ils semblent s’être mis en place dès la tombée de la nuit et être environ 20 à 25. Les G.M.P.R. ont riposté aux armes automatiques et à la grenade. L’attaque du poste semble avoir duré jusqu’à environ 2h30. Les rebelles semblent s’être divisés en deux groupes qui ont pris la direction des Mines de Breira, l’un utilisant le cheminement de l’oued et l’autre celui des crêtes.

Dès les premiers coups de feu sur Beni-Akil les deux sections du 22ème R.I. se Le carreau de la mine de BREIRA P.ANTIKOWtrouvant à Breira ont été mises en alerte. A 2h45 quatre coups de fusil de chasse étaient tirés sur les mines de Breira et semblaient provenir des hauteurs Sud, Sud-ouest de la mine. Le poste visé a répondu immédiatement au F.M. Le calme semblait revenu vers le poste de Breira aux environs de 4h. Plus aucun mouvement à signaler.

Ce Compte rendu tient surtout compte des informations fournies par le responsable des G.M.P.R. et se termine par une note concernant les heures de prise de service des mineurs tôt le matin et tard à la nuit.

Des tirs de nuit ont encore eu lieu à Beni-Akil les 5 et 6 octobre, C’est à cette dernière date que les G.M.P.R. ont été remplacés par une autre section de notre compagnie.

Toute cette affaire nous a valu de la visite : d’abord celle du directeur de la mine,  du Colonel Pasteur commandant le 22ème R.I. et du représentant du Ministre puis, le 13 octobre, d’une unité blindée accompagnée par une unité de Zouaves. Le 19 octobre notre compagnie a laissé la protection des deux mines à une autre compagnie, la 5ème, sauf erreur.

 

Maurice Mouterde

 

 

 

 

 

 

ACCROCHAGE A L'OUED MESSELMOUN LE 31 JUILLET 1956

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ACCROCHAGE A L'OUED MESSELMOUN

LE 31 JUILLET 1956

 

 

Accrochage à l’Oued Messelmoun le 31 juillet 1956

 

Puisque l’on parle de la période où la 6ème  compagnie du II / 22R.I. fut à Gouraya, nous avons eu à l’oued Messelmoun un autre petit accrochage le 31 Juillet. Ce soir là comme presque tous les jours nous sommes partis en patrouille avec une jeep et l’half-track qui nous était affecté. Le but étant de sécuriser les fermes et maisons isolées et aussi les cultures. Pour ce faire nous utilisions un projecteur assez puissant emprunté à la brigade de gendarmerie de Gouraya. Ce soir là c’est moi-même qui manipulais cet appareil à l’avant droit Half-tracks.jpgde l’half-track. Après avoir quitté la route nationale nous nous sommes engagés sur la piste qui borde l’oued Messelmoun. Non loin de la villa où le général Clark prit contact en 1942 avec les autorités françaises d’Algérie, alors que nous surveillions les vignes à l’aide du projecteur, nous nous sommes fait allumer. Pas de victime. Mais, impossible de riposter à l’aide de la mitrailleuse de l’half-track. Nous avons donc du nettoyer la vigne qui ce trouvait là, uniquement à l’aide de nos P .M. C’est le lendemain, au jour que nous avons compris pourquoi notre arme ne fonctionnait pas. Une chevrotine avait percé le chargeur de la mitrailleuse et tordu toutes les cartouches. C’est aussi le lendemain que nous avons constaté la présence à proximité de la S.A.P. (Société Agricole de Prévoyance) où, les H.L.L. étaient sûrement en train de se ravitailler.

La compagnie a quitté Gouraya le 3 Août  1956 pour Orléansville.

Personnellement j’ai rejoint Cherchell où un stage d’un mois était organisé pour une vingtaine de Lieutenants et Sous-lieutenants du 22° R.I.

 

Maurice Mouterde

 

 

 

L'ACCROCHAGE DE SADOUNA DU 18 JUILLET 1956

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L'ACCROCHAGE DE SADOUNA DU 18 JUILLET 1956

 

La double embuscade de Sadouna a déjà fait l'objet d'un article écrit par Jean Claude Picolet, et  publié sur le blog le 4 novembre 2013. Nous en avions tous les deux discuté à l'époque, et nous étions troublés par le fait qu'une revue de notoriété nationale, le "Nouvel Observateur", ait publié dans ses lignes un article aussi invraisemblable. Celui-ci concluait sur un bilan de 50 à 60 tués dans nos rangs dont la moitié pour notre régiment le 22ème R.I.

 

Sur mon conseil, Jean Claude a pris contact par mail avec Monsieur Laurent Joffrin, Directeur des Publications du "Nouvel Obs" pour lui révéler la réalité des faits et constater le manque de professionnalisme des journalistes concernés. Il attend toujours une réponse…

 

Or un ancien du régiment Albert ROUSSEL, a fait un excellent travail de mémoire en listant les militaires du 22ème R.I. morts dans la période 1956/1963. De même un universitaire Jehan Loïc ROGNANT avait de son côté effectué un travail similaire.

 

Nous disposons donc de deux sources indépendantes et précises nous donnant les nom et prénom des militaires "morts pour la France" en Algérie dans la période précitée, que ce soit au combat, par accident, ou par maladie. Outre les noms et prénoms, figurent, la date de leur mort, le lieu, l'évènement qui l'a provoqué et enfin le lieu où ils sont inhumés.

Pour toute l'année 1956 nous relevons pour l'ensemble du régiment, 15 morts dont un seul à SADOUNA.

 

Maurice MOUTERDE qui se trouvait en poste en 1956 dans ce secteur, nous éclaire sur cet évènement, et rétablit la vérité.

 

                                                                           Michel.

 

 

A propos de l’accrochage de Sadouna

 

 

Parcourant le Blog de Michel, je suis tombé sur la rubrique : La double embuscade de Sadouna. Ce nom a tout de suite fait tilt dans ma mémoire.

 

Ayant participé à cette action sans toutefois avoir été présent sur les lieux de l’embuscade, je peux apporter quelques précisions à partir de mon carnet de notes quotidiennes et d’une lettre écrite à un de mes frères où je rapporte l’évènement et que j’ai retrouvée. En effet sous-lieutenant rappelé j’appartenais à la 6ème compagnie du II / 22 R.I.

Je rappelle d’abord que notre compagnie venant de Montenotte était arrivée à Gouraya le 9 juillet 1956 et s’était installée à Bois sacré, l’ancienne résidence du gouverneur Leonart. Le 13 Juillet nous avons pris contact à Loudalouze avec le caïd du Douar Aghbal (qui est Agha, décoré de la légion d’honneur et de la médaille militaire) et la section de l’école de Cherchell que nous devions relever. Le caïd de ce douar a de nombreux choufs qui le renseignent efficacement. Le 14 juillet à Gouraya, nous avons fêté comme il se doit la République par une prise d’armes devant le monument au mort, à proximité de l’église.

Prise-d-arme-14-juillet-a-Gouraya-photo-M-Mouterde.jpg

Je pense que c’est par le caïd de Loudalouze que nous avons eu le renseignement, mercredi matin, 18 Juillet que la bande de H.L.L. qui avait incendié la Maison Forestière de Tighret, la ferme Duranton, la villa de Messelmoun, avait couché à Sadouna. Aussitôt, le même jour,  une opération est montée par le III / 22 R.I.  auquel nous sommes provisoirement rattachés, pour effectuer le bouclage du djebel Gouraya. Très rapidement, notre compagnie est approchée en camion jusqu’au pied du djebel, là où la piste s’arrête au Sud-ouest de Gouraya (est-ce le lieu qui s’appelle Sidi Masba ou Mesba ?). C’est là que m’a été confiée la garde des camions avec une ½ section.

 

Il était 19h quand nous avons entendu la fusillade qui se produisait en altitude. J’ai donc essayé de prendre contact avec la compagnie à l’aide du SCR 300 que j’avais à ma disposition. Impossible d’avoir la liaison. Que s’était-il passé ?

C’est au bout de 2h que quelques hommes nous ont rejoints pour nous expliquer que lorsque la compagnie était arrivée à proximité de mechtas sur le plateau, un gendarme, traducteur, avait interrogé quelques personnes qui lui avaient affirmé l’absence de H.L.L. Quelques instants plus tard les fellaghas avaient ouvert le feu tuant Callendret, le radio (ce qui explique l’impossibilité de communiquer) et blessant 3 hommes. Ils nous demandaient d’aller au secours de nos camarades. Les blessés étaient le Sergent-chef Yves Merle, le soldat Marcel Autignac et un gendarme de la brigade de Gouraya.

Après avoir été rapidement chercher quelques renforts à Bois Sacré, avec l’équivalent d’une grosse ½ section, nous avons donc entrepris, de nuit, notre montée pour rejoindre la compagnie. Arrivée au col à la fin de la  pente c’est en vain que nous avons fouillé, sans succès, (près sauf erreur, d’un lieu-dit Sidi Youssef) la zone boisée où, selon ceux qui étaient venus à notre rencontre, nos camarades de la compagnie étaient censés s’être repliés. Sans liaison radio et sans vision claire de la situation (il faisait nuit, aucune connaissance du lieu et les mechtas sur le plateau étaient probablement encore occupées par les H.L.L.) nous n’avions qu’à redescendre (à Sidi Masba ou Mesba), ce que nous avons fait.

 

carte-EM-Maurice-Mouterde-copie-1.jpg

                     Cliquez sur la carte pour l'agrandir

 

Quelle ne fut pas notre surprise, de constater que les camarades accrochés étaient descendus avant nous et déjà partis pour Bois Sacré. En effet nous nous étions croisés dans le Djebel sur deux sentes différentes sans nous entendre et pourtant nos camarades brancardaient 1 mort et 2 blessés. En effet le sergent-chef Merle, pourtant transpercé au poumon avait refusé d’être porté. En ce qui concerne le capitaine Mercier, je confirme qu’il a également été blessé, mais assez superficiellement, à la hanche.

Effectivement cet accrochage est, je crois, le premier qu’ai eu notre régiment de " rappelés " et René Callendret le premier mort. Je confirme que les " pertes " se sont limitées à 1 mort et 3 blessés. Je n’ai jamais su quel avait été le bilan pour l’A.L.N.

Peut-être ne suis-je pas au courant de tout ce qui s’est passé ce jour là dans le secteur de Gouraya, mais je ne vois pas comment on peut parler de double embuscade. Je n’ai pas non plus eu connaissance que les tirailleurs Sénégalais soient intervenus dans le secteur.

Quant à l’Aïd el Kebir, j’ai cantonné avec ma section à Loudalouze du 19 au 28 Juillet et c’est là que nous avons participé à cette fête le 20 Juillet avec la population.

Un petit détail secondaire, Sadouna n’a jamais été une commune mixte. Il y avait deux communes de ce type dans nos secteurs, celle de Cherchell et celle de Ténès. Il me semble que Sadouna était rattaché à Cherchell.

 

                                               Maurice Mouterde

 

 

 

 

 

 

 

 

LA MORT HEROIQUE DU SERGENT MICHEL BERTHET

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LA MORT HEROIQUE DU SERGENT MICHEL BERTHET

 

 

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Michel BERTHET de face avec des lunettes de soleil      Michel BERTHET est de face avec des lunettes de soleil.

 

      Une rue de Lyon dont il était originaire porte son nom.

 

 

                                                        Maurice MOUTERDE


ACCROCHAGE ENTRE BORDJ BACH ET OUACHACHE

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UN ACCROCHAGE ENTRE BORDJ BACH

ET OUACHACHE

 

40 hors la loi abattus

       Cet article est extrait du site internet: www.tenes.info/galerie/22RI

 

Bordj-Baach--attaque-de-3-mechtas-fortifiees-redecoupee.jpg        Cet article m'a été communiqué par Maurice Mouterde.

 

Trace--de-la-piste-bordj-bach-Ouachach.jpg                       Tracé de la piste qui relie Bordj Bach à la maison forestière d'Ouachach.

 

                                                                                                  

 

                                                                                  Michel.

L'EMBUSCADE SUR LA PISTE MARCEAU - TIZI FRANCO

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L'EMBUSCADE SUR LA PISTE

MARCEAU - TIZI FRANCO

 

Cinq articles ont déjà été publiés sur le blog sur cette embuscade. Je vous les rappelle dans l'ordre de leur parution :

     Les - 16/12/2008.  L'embuscade du 9 janvier 1957.

            - 28/04/2009.  Témoignage de Marcel PARIS.

            - 18/11/2009.  Une embuscade comme cadeau d'anniversaire.

            - 25/11/2009.  Plusieurs témoignages sur l'embuscade du 09/01/1957.

            - 14/03/2013. Le miraculé du 9 janvier 1957.

 

Le 9 janvier 1957, j'étais en poste à Ténès depuis 8 jours à peine, et à cette époque je déjeunais et dînais tous les jours au mess des officiers avec à table face à moi un lieutenant du 2ème bureau, et à la table voisine, tous les officiers supérieurs de l'état major. A aucun moment je n'ai eu connaissance de cette embuscade, ni d'ailleurs de celle du 28 février 1957 !...

 

En m'inspirant de l'article écrit par Jean Claude PICOLET sur l'embuscade du 28 février 1957, je vais essayer de faire la synthèse de tous les documents que je me suis procurés sur cet évènement.

 

L'EMBUSCADE DU 9 JANVIER 1957.

Repos-a-la-maison-forestiere-de-TIZI-FRANCO-photo-P.JANIN.jpg        Photo Pierre Janin 

 

Ce 9 janvier au retour d'un ravitaillement à la maison forestière de TIZI FRANCO, un convoi militaire du 3ème Bataillon du 22ème RI tombe dans une embuscade sur la piste qui mène à MARCEAU. Le bilan humain est très lourd.

 

LES RAISONS DE MON INTERET POUR

CET EVENEMENT.

 

A la sortie de l'école d'officiers de CHERCHELL, nous étions trois Aspirants à avoir choisi le 22ème RI au détriment des "Paras" et même de quelques postes à la "Légion Etrangère", au grand désespoir des officiers instructeurs. Ce régiment reconstitué en totalité avec des rappelés, avait très mauvaise réputation.

Nous avions convenu de nous retrouver à MARSEILLE pour rallier notre poste le 31 décembre 1956. Notre ordre de mission nous demandait de rejoindre GOURAYA. Pour ce faire, nous avons bien imprudemment utilisé l'autobus de la ligne côtière "ALGER – CHERCHELL – GOURAYA". En route nous avons été arrêtés à un barrage militaire, et invités à quitter rapidement ce bus pour prendre un convoi et ainsi terminer notre parcours. A notre décharge, à l'école, si l'on nous enseignait l'art de la guerre et le commandement d'une section, on nous formait surtout à la pacification. A titre d'exemple, si nous disposions chacun d'un fusil "Garant M1", on nous avait remis seulement un clip et ses 8 cartouches, que nous devions coudre dans un linge blanc immaculé. Seules exceptions à cette règle, la garde à la poudrière, et la protection des fermes, où l'on nous remettait pour la cause, d'autres armes et leur lot de cartouches. Heureusement, nous n'avons jamais été attaqués et pourtant nous étions très souvent dans le djebel sans autre protection que la nôtre.

Entree-de-la-CCAS-a-GOURAYA-photo-Daniel-MALLET.JPG      Entrée de la CCAS à Gouraya.   Photo Daniel Mallet.

 

Arrivé à GOURAYA nous rejoignons rapidement les bureaux du 22ème RI, où nous sommes reçus par un capitaine auquel nous présentons nos ordres de missions. Ce dernier nous informe que le Colonel et l'Etat Major ont quitté Gouraya depuis déjà plusieurs mois et qu'ils se trouvent actuellement à Ténès. Il  prévient le Colonel de notre arrivée et nous signale que nous allons passer 2 jours en sa compagnie en attendant le prochain convoi. C'est lors du réveillon Du 31 décembre 1956 que ce capitaine nous informa que l'un de nous rejoindrait son bataillon, et nous demanda s'il y avait un volontaire. L'un de nous ayant une petite amie à Gouraya, le choix fut vite fait.

 

Nous nous sommes retrouvés tous les trois début janvier 1958 lors de notre démobilisation, et nous nous sommes raconté les moments forts que nous avions vécus au 22ème RI.

 

Ce camarade, dont malheureusement j'ai oublié le nom, nous raconta cette embuscade du 9 janvier 1957, il devait prendre le commandement de cette section, et se trouvait dans la jeep avec le Sous Lieutenant. Je l'ai raconté dans l'un des articles précédemment cités.

 

C'est pour cette raison, que je m'intéresse tout particulièrement à cet évènement.

 

LES SOURCES.

 

Je dispose de plusieurs témoignages ou documents officiels que je vais recouper et tenter ainsi de faire jaillir la vérité.

 

            1) – Le rapport du Capitaine Claude RONGIER commandant par intérim le III / 22 RI. Ce document officiel a été obtenu par Claude MONJAUX auprès du service Historique de la défense. Il est complété par une liste nominative des morts, une liste nominative des blessés, et un croquis du convoi sur le lieu de l'embuscade.

            2) – Le compte rendu rédigé par le Commandant KUBLER et publié dans le journal du 22ème RI, le "DAHRA" présentant l'installation du 3ème Bataillon en Algérie dans le secteur de Marceau et donnant lui aussi une liste nominative des morts et une liste des militaires indemnes.

            3) – Le témoignage écrit de Claude MONJAUX, gravement blessé, fait prisonnier quelques minutes par les HLL, puis abandonné lorsque l'aviation est arrivé. Il passa la nuit caché dans un buisson et fut retrouvé le lendemain matin par les secours.

            4) – Le témoignage écrit de Louis MARTIN, blessé au genou et à la main, il réussit à fuir par l'oued, fut récupéré par les secours et hospitalisé à Miliana.

            5) – Le témoignage écrit de Marcel PARIS publié sur le blog le 28 avril 2009. Deux de ses camarades furent tués dans cette embuscade.

            6) – Le témoignage écrit de Charles MEURISSE publié sur le blog le 18 décembre 2008. Charles conduisait la jeep dans laquelle se trouvaient le Sous Lieutenant GODIE, l'Aspirant qui devait le remplacer ultérieurement, et 2 soldats. Son véhicule qui était placé en seconde position dans le convoi fut protégé par le GMC qui le précédait ce qui sauva la vie des occupants.

            7) – Le témoignage écrit de Christian GERARD publié sur le blog le 25 novembre 2009. Christian avait lui aussi deux amis dans le convoi qui sont décédés. Il faisait partie des premiers secours, et participa à la mise en bière des corps, puis à l'enterrement à NOVI.

            8) – Un article paru dans " Le soir d'Algérie" écrit par Mr BELARBI, qui nous livre sa version de cette embuscade. Cet article a été publié sur le "Net" à l'adresse suivante.

  http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2006/01/09article.php?sid=32915&cid=23

 

LE LIEU DE L'EMBUSCADE.

 

Le rapport du Capitaine RONGIER (1) situe l'embuscade en LY 75 B 15. On ne peut pas être plus précis. L'emplacement est judicieusement placé au 2/3 de la piste en partant de MARCEAU où se trouvaient les renforts les plus importants, donc un parcours plus long, laissant aux moudjahidines plus de temps pour décrocher et échapper aux éventuels poursuivants.

emplacement-de-l-embuscade-du-09-01-1957.jpg      Les 2 flèches noires précisent le lieu de l'embuscade.

 

Comme nous pouvons le constater sur le plan ci-dessus, la piste est sinueuse, et encore l'échelle du plan ne donne qu'une pâle idée de la réalité. Avec des virages en épingles à cheveux, où les GMC, étaient obligés de faire des manœuvres pour les monnayer. Claude MONJAUX (3) et Louis MARTIN (4) m'ont précisé que pour faire ces manœuvres il fallait quelquefois descendre des véhicules pour décrocher la remorque, ou la tonne à eau. Les véhicules étaient dans ces moments très exposés. J'ai interrogé ces deux témoins sur la distance qui séparait MARCEAU de TIZI FRANCO, tous deux m'ont répondu qu'il ne fallait pas raisonner en kilomètres, mais en temps, tellement la piste était difficile.

 

Je ne possède aucune photo du lieu de l'embuscade.

 

LES FORCES EN PRESENCE.

 

Les militaires du convoi dépendaient de la 10ème Compagnie du III / 22 RI. Ils étaient en poste à MARCEAU où ils logeaient dans une école. Le rapport du Capitaine RONGIER (1) établi après avoir consulté le chef du convoi le Sous Lieutenant GODIE nous donne une description très précise de ce convoi.

 

Les véhicules circulaient dans l'ordre suivant :

TAOURIRA-on-charge-le-GMC-de-pierres.jpg      GMC avec tourelle, la mitrailleuse n'étant pas en place. photo Georges Paysac.

 

-         Le GMC blindé armé d'une mitrailleuse 12/7 sur tourelle.

-         La jeep du chef de convoi.

-         2 GMC.

-         1 Chevrolet

-         1 Jeep

-         1 Half-track équipé de 2 mitrailleuses.

 

Le personnel de la section d'escorte était divisé entre les 3 GMC.

 

Quant au nombre exact de militaires dans le convoi, le rapport ne le précise pas, mais si l'on comptabilise : la section d'escorte = 30 hommes, les 7 chauffeurs, l'équipage du Half-track 4 hommes, les 2 officiers + les militaires de la 9ème compagnie qui avaient pris place à bord des véhicules pour descendre au P.C. du Bataillon à NOVI ce qui était le cas  de Claude MONJAUX. On peut donc l'estimer  autour d'une cinquantaine.

 

Christian GERARD (7) dans son témoignage indique qu'à l'aller, il y avait de nombreux militaires sans armes qui, revenant de France rejoignaient leur base à TIZI FRANCO, ils passèrent sans dommage devant les HLL.

 

Pour Mr BELARBI (8) le nombre de militaires dans le convoi au moment de l'embuscade est très supérieur, car il annonce 70 morts?...

 

J'y reviendrai.

 

L'ALN.

 

Mr BELARBI (8) précise que l'ALN avait regroupé pour cette opération 4 sections, une centaine d'hommes. Je dirais plutôt 120.

De notre côté, Louis MARTIN (4),  Charles MEURISSE (6) et l'aspirant qui commandait en second le convoi ont déclaré avoir vu sur le terrain environ 200 postes de combat. Ces deux chiffres ne sont pas incompatibles, en effet nous pouvons penser qu'en sus des combattants, il y avait des porteurs pour transporter le matériel récupéré.

 

La supériorité numérique au profit de l'ALN était de 1 pour 2. Si l'on y rajoute l'effet de surprise et l'avantage du terrain qui surplombait les véhicules, on comprend mieux l'effet dévastateur de cette embuscade.

 

LES PREPARATIFS

 

Je laisse la parole à Mr BELARBI (8).

Cette attaque préparée minutieusement par un vaillant moudjahid SI HAMDANE BENMOUSSA avait pour objectif de récupérer des armes pour doter les nouvelles recrues, notamment des collégiens et des lycéens qui avaient rejoint le maquis après les grèves.

Il avait constaté que régulièrement un convoi militaire procédait à l'approvisionnement du poste de TIZI FRANCO à des heures plus ou moins fixes, partant de CHERCHELL et passant par MARCEAU.

 

Le jour de l'embuscade, à partir des maisons du douar où ils étaient embusqués, les éléments de l'ALN observaient le mouvement de l'ennemi. Mais pour des raisons de sécurité, les maquisards avaient jugé utile de n'intervenir qu'au retour du convoi, sachant qu'à cette période de l'année la nuit commençait à tomber à partir de 16h30.

S'assurant que les militaires étaient arrivés à TIZI FRANCO, un fossé au travers du sentier s'est vite creusé par les moudjahidines aidés par les habitants du douar, dans le but d'immobiliser à son retour le convoi.

Une-coupure-de-piste-a-TIZI-FRANCO-photo-M.PARIS.jpg      Photo Robert Ageron

 

L'ARMEMENT

 

L'ALN

 

Aucune précision n'est apportée sur leur armement, sinon que Mr BELARBI (8) indique : SI HAMDANE BENMOUSSA déclencha la mitraillade à l'aide de son MAT 49. On peut toutefois penser qu'ils étaient équipés de vieux fusils de guerre, de fusils de chasse qui avec des balles ou des chevrotines sont des armes très maniables et très meurtrières à faible distance, et des grenades.

 

Le 22ème RI.

 

A de rares exceptions, tous les militaires étaient armés. Claude MONJAUX en poste à TIZI FRANCO descendait à MARCEAU pour y faire réparer 3 armes. Seuls les militaires qui partaient en soin ou en permission n'étaient pas armés.

Comme toute section de combat, il devait y avoir un FM 24/29, 2/3 de fusils GARANT M1, et 1/3 de MAT 49, et peut être un fusil lance grenades. Les différents rapports n'apportent aucune information à ce sujet.

 

Un GMC blindé était équipé d'une tourelle avec une mitrailleuse 12/7.

Un Half-track avec ses 2 mitrailleuses, une de 30 (7,62) et une de 50 (12,7)

 Sur-la-piste-d-AZIEM-photo-Marcel-PARIS-copie-1.jpg      

 

Par contre ce convoi ne bénéficiait pas ce jour là de couverture aérienne. Tous les témoins à l'exception de Mr BELARDI (8) sont d'accord sur ce point. Le convoi était parti avec du retard de MARCEAU, car il attendait l'avion qui n'est pas venu.

Mr BELARBI (8) parle de deux avions "Jaguar", quand on sait que cet avion dans sa version de combat, a fait son premier vol le 23 mars 1969, on comprend aisément qu'il ne pouvait pas protéger le convoi. Enfin, si "avion" il y avait eu, la coupure de piste aurait été facilement décelée et le convoi arrêté avant l'embuscade.

 

LE TERRAIN.

 

C'était une piste difficile, sinueuse et aménagée très sommairement. Il existait bien une seconde piste plus à l'ouest qui desservait au passage la maison forestière de BOUSMANN, mais cette dernière avait été abandonnée après la libération des premiers contingents de rappelés, courant novembre, faute d'effectif. Cette dernière piste était encore beaucoup plus difficile que la piste "Est" et n'était plus utilisée.

 

Le Capitaine RONGIER (1) fait une description précise du lieu de l'embuscade :

"En LY 65 B 15 la piste décrit une courbe à grand rayon d'une longueur de 300 mètres environs (voir croquis ci-dessous).

Croquis-de-l-embuscade-du-09-01-1957.jpg

 

Cette piste est bordée du côté gauche (sens de la descente) d'un talus de 2m50 à 3m de haut au dessus duquel le terrain est couvert de buissons de 1 mètre de haut maximum. C'est dans cette partie de l'itinéraire que les rebelles avaient tendu l'embuscade.

 

L'étude du croquis ci-dessus, permet de  constater que tous les véhicules sont restés sur la piste. Que le convoi à l'arrêt s'étalait sur environ 150 mètres. Enfin, l'indication d'un oued, (l'oued ANACER vraisemblablement), corrobore les déclarations des militaires qui se sont enfuis dans le lit de cet oued.

 

LE CHOC.

 

Mr BELARBI (8) déclare : Les 4 sections des moudjahidines arrivèrent au douar des BENI BOUSSALAH deux jours auparavant afin de préparer minutieusement l'opération. Le 9 janvier au matin, les forces rebelles étaient donc sur le lieu de l'embuscade et pour des raisons de sécurité laissèrent le convoi filer sur TIZI FRANCO.

 

Dans son rapport le capitaine RONGIER (1) précise : Le convoi quittait TIZI FRANCO à 15 heures 15, sur cette piste extrêmement difficile et sinueuse, les véhicules roulaient à 50 mètres les uns des autres. Le convoi descendant aborda le lieu de l'embuscade vers 15heures 40, le véhicule de tête apercevant la coupure de piste stoppa et tous les véhicules en firent autant ce qui occasionna un certain resserrement des 3 véhicules de tête (voir croquis ci avant). Au même moment les rebelles cachés dans les buissons au dessus du talus déclenchèrent un feu violent d'armes automatiques (PM) et de fusils de guerre et de chasse, sur le convoi. Après un instant de stupeur, l'escorte réagit par le feu sur un ennemi invisible et qui le dominait. Puis sautant sur le talus, le chef d'escorte le sous lieutenant GODIE, rassemblant les valides des 2 camions de tête et de sa jeep, essaya de déborder les éléments rebelles par un petit oued, mais ils furent repoussés et rejetés de l'autre côté de la piste. C'est vraisemblablement à ce moment que GODIE fut blessé.

 

A l'autre extrémité du convoi les premières rafales rebelles furent suivies d'un assaut à la grenade des quatre véhicules. L'escorte se défendit vaillamment mais devait succomber sous le nombre. L'ensemble du combat dura 40 minutes environ, évaluation faite par les rescapés et confirmé par le renfort.

 

Je donne maintenant la parole aux survivants.

 

Louis MARTIN (4) qui se trouvait dans le dernier GMC du convoi nous précise. Dès le début de l'embuscade je sautais à terre avec quelques camarades et nous nous réfugions sous le GMC. La mitraille redoublait et nous ne pouvions pas riposter. Avec mes camarades, nous décidons de fuir en direction de l'oued qui borde la piste. C'est en traversant cette dernière que je fus blessé au genou. Nous réussissons avec mes camarades à rejoindre le lit de l'oued et à fuir. Nous retrouverons un peu plus loin un autre groupe qui comme nous avait réussi à se mettre à l'abri des tirs ennemis.

 

Quant à Claude MONJAUX (3) qui se trouvait dans le second GMC, deux de ses camarades furent tués dans le véhicule dès les premiers coups de feu. Légèrement blessé à une main, il sauta sur la piste et descend dans l'oued où il retrouve un copain. Blessé à nouveau à la jambe gauche, il se cache derrière un rocher. Retrouvé par les fellaghas, il échappe miraculeusement à la mort, et est abandonné grâce à l'arrivée de l'aviation (des T6) qui mirent en fuite les HLL. Il passa toute la nuit sur le terrain et fut retrouvé le lendemain matin par les tirailleurs Sénégalais. Claude me précisa que l'un des premiers morts de cette embuscade, fut le servant de la mitrailleuse du premier GMC.

 

De son côté Charles MEURISSE (6) chauffeur de la jeep du Sous Lieutenant, placée en seconde position dans le convoi, précise. Le premier véhicule s'arrête un peu avant le fossé creusé sur la piste. Derrière, je stoppe brutalement le Lieutenant à côté de moi est éjecté ce qui le sauve, car à ce moment un feu nourri éclate sur le côté. Le lieutenant rassemble les survivants de tête, 6 soldats. Nous nous glissons sous le camion, puis tentons une contre attaque. Rejeté nous nous enfuyons dans l'oued. C'est vraisemblablement à ce moment que le lieutenant fut blessé et qu'il se cacha dans un buisson d'épineux. Nous suivons le cours de l'oued jusqu'à  ce que nous rejoignons quatre camarades de l'arrière du convoi qui comme nous avaient fui. Notre lieutenant fut retrouvé par les secours et héliporté vers l'hôpital MAILLOT à ALGER.

evacuation-des-morts-embuscade-photo-E.COURRALY.jpg     Evacuation des blessés. Photo Edmond Courraly.

 

Le Capitaine RONGIER (1) dans son rapport, précise.

Les coups de feu et les éclatements furent entendus à MARCEAU poste de la 10ème Compagnie à 15heures 45. Aussitôt, le lieutenant GAILLARD commandant cette compagnie alerta la seule section dont il disposait et la fit embarquer dans les véhicules. Parallèlement il rendit compte au sous secteur (communication obtenue à 16 heures) et demanda l'envoi immédiat d'avions sur le lieu du combat, puis parti avec son convoi.

Les renforts partis de MARCEAU arrivèrent sur le lieu de l'embuscade à 16heures 30 et les renforts aériens à 16 heures 35. A ce moment le combat avait cessé. D'après les blessés ramassés sur le terrain, les rebelles se seraient retirés dès qu'ils entendirent les avions et les camions qui approchaient. Ce que confirme Claude MONJAUX (3) dans son récit.

 

La section de renfort remontant la colonne tua un rebelle caché dans les buissons et récupéra son fusil de chasse.

 

Le Colonel DARCY commandant le sous secteur Nord et le commandant du III / 22ème RI arrivèrent sur le terrain à 16heures 50.

 

LE BILAN.

 

Tous les documents que je possède sur ce sujet, concordent à l'exception de l'article écrit par Mr BELARBI (8); En effet ce dernier déclare 70 morts dans nos rangs ?....

 

J'ai recoupé l'ensemble des relevés que je possède :

-         Ceux d'Albert ROUSSEL, établis par évènements ou annuellement.

-         Ceux de Jehan Loïc ROGNANT classés alphabétiquement.

-         Ceux du DAHRA.

-         Enfin celui joint au rapport du capitaine RONGIER (1) qui précise : "Il fut relevé sur le terrain 25 morts dont un gendarme, 18 blessés furent évacuer par hélicoptère sur les hôpitaux de MILIANA et d'ALGER.. La liste jointe à ce rapport qui ne concerne que les éléments du 22ème RI, comporte 26 noms, (24 morts relevés sur le terrain + 2 blessés décédés à l'hôpital de MILIANA dans les deux jours qui ont suivi). Parallèlement une liste des 16 blessés survivants est jointe au rapport.

 

Ce bilan est très lourd, mais nous sommes loin, très loin des chiffres avancés par Mr BELARBI (8).

 

Les pertes en armes furent très importantes, plusieurs mitrailleuses, des fusils, et des pistolets mitrailleurs (MAT 49). Le capitaine RONGIER (1) précise à ce sujet dans son rapport : Une grande partie de l'armement du convoi fut pris par les rebelles, qui eurent le temps de piller et d'achever un certain nombre de blessés et de décrocher avant l'arrivée des renforts. Cette dernière déclaration sous entend, que les morts ont été dépouillés de leurs vêtements et de leurs chaussures.

Mr BELARBI (8) dans son exposé déclare que le chef des moudjahidines avec son pistolet mitrailleur MAT 49, tua le capitaine qui commandait le convoi ?... Dans ce convoi, il n'y avait pas de capitaine, le chef du convoi était le sous lieutenant GODIE qui fut blessé au genou, et retrouvé par les secours caché dans des épineux. Il fut évacué par hélicoptère sur l'hôpital MAILLOT à ALGER. Claude MONJAUX(3) précise qu'il l'a rencontré, amputé d'une jambe, en convalescence à l'hôpital BEGUIN à VINCENNES. Il n'y donc eu aucun officier de tué dans cette embuscade.

 

Christian GERARD (7) qui faisait partie de l'unité de secours arrivée la première sur les lieux de l'embuscade conclut ainsi son témoignage :"Nous, nous avions les corps à MARCEAU, les blessés ayant été acheminés sur MILIANA et ALGER. Les corps après reconnaissance et remise en état, mission effroyable (pas de mots assez forts) pour définir l'horreur, ont été mis en bière. La messe et l'enterrement  eurent  lieu à NOVI quelques jours après.

Tombes-des-morts-embuscades-TIZI-FRANCO-Cimetiere-de-NOVI.jpg      Photo Marcel Paris.

 

Témoignage émouvant laissant percer un doute, que je ne commenterai pas.

 

Quant aux rebelles nous savons peu de chose sur leurs pertes. Le capitaine RONGIER (1) signale un HLL tué par les renforts et son fusil de chasse récupéré. De son côté Mr BELARBI (8) rapporte la perte de 4 moudjahidines dont il cite les noms. Ceux-ci n'ont pas été retrouvés sur le lieu de l'embuscade, ce qui laisse supposer que les HLL emportèrent leurs morts.

 

On peut donc conclure :

-         Pour le 22ème RI : 26 morts et 16 blessés auxquels il faut rajouter 1 gendarme.

-         Pour les HLL : 5 morts.

C'est heureusement très éloigné du chiffre avancé par Mr BELARBI (8).

 

Ceci nous permet de mieux cerner le nombre de militaires du 22ème RI présents dans ce convoi. En effet le commandant KUBLER précise dans le DAHRA qu'il y avait 12 rescapés indemnes dans cette embuscade. Ce qui fait en récapitulant : 26 morts + 16 blessés + 12 rescapés, un total 54 militaires du 22ème RI auxquels il faut rajouter un gendarme.

 

 

LA REACTION.

 

L'embuscade avait été parfaitement organisée, et la tombée rapide de la nuit protégea la fuite des moudjahidines. Les renforts s'occupèrent tout d'abord des blessés qui furent évacués par hélicoptères sur les hôpitaux de MILIANA et d'ALGER pour les cas les plus graves. Puis des morts qui furent regroupés à NOVI.

 

Le capitaine RONGIER (1) dans son rapport officiel déclare : "Les avions T6 arrivés sur les lieux à 16 heures 35, n'ont eux-mêmes rien vu des mouvements des rebelles.". Il indique également que le déplacement et la mise en place de cette bande étrangère au quartier du bataillon n'ont pu se faire sans l'entière complicité de la population avoisinante à cette piste. Cette population assez nombreuse n'a voulu fournir aucun renseignement sur la direction prise par les rebelles pour se retirer.

 

Mr BELARBI souligne d'ailleurs la participation de la population des douars voisins au creusement de la tranchée sur la piste. Rien ne prouve non plus qu'ils n'y aient pas été contraints.

 

Dès le lendemain matin, une grosse opération fut organisée sur le secteur, avec la participation du 22ème RI, des tirailleurs Sénégalais et des parachutistes. A ce sujet, Claude MONJAUX rapporte qu'alors qu'il venait juste d'être remonté sur la piste par les tirailleurs, le Général SALAN est venu l'interroger sur la direction qu'avaient prise les HLL après l'embuscade. Ces derniers avaient bénéficié de toute la nuit pour se mettre à l'abri, loin du lieu de l'embuscade.

 

Mr BELARBI rapporte que le chef des combattants de l'ALN, SI HAMDANE BENMOUSSA est tombé au champ d'honneur le 12 janvier 1957 trois jours seulement après l'embuscade, alors qu'il se trouvait au sud d'EL AFFROUN.

 

Je ne retrouve rien d'autre sur les suites de cette grosse opération, ce qui laisse à penser que les moudjahidines, s'étaient volatilisés.

 

CONCLUSION

 

Cette embuscade fut pour le 22ème RI l'une des plus meurtrières avec celle du 28 février 1957, et elle marqua fortement les esprits. Le lieutenant GAILLARD qui commandait l'unité qui arriva en premier sur les lieux de l'embuscade en fut fort affecté et le souligna dans sa correspondance à son épouse.

 

Dans son rapport officiel le capitaine RONGIER (1) conclut : "Les conditions dans lesquelles s'est déroulée cette affaire prouvent une fois de plus la vulnérabilité de ces convois de ravitaillement peu étoffés en escorte en raison de la faiblesse des moyens en personnel et en véhicules".

 

Pour surveiller le territoire, l'on avait essaimé de nombreux petits postes perdus dans la montagne, difficiles d'accès et qu'il fallait très régulièrement approvisionner. C'était un peu le talon d'Achille de notre armé, et les moudjahidines en ont profité.

 

Enfin, pour nous, l'important est de démêler le vrai du faux, notre régiment a payé un lourd tribut à cette guerre d'Algérie, il n'est donc pas nécessaire pour des raisons démagogiques de travestir la vérité.

 

 

                                               Michel FETIVEAU

LE 22ème R.I. C'ETAIT VOTRE UNITE

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 Insigne-du-22-RI                         

 

 

 

 

 

C'ETAIT VOTRE UNITE

LE 22ème  REGIMENT D'INFANTERIE

"COURAGEUX ET ROBUSTE

                          DANS LA BONNE HUMEUR"

 

 

Le 22ème Régiment d'Infanterie trouve ses origines sous la monarchie dans la création du Régiment de Viennois en 1776, lui-même formé à partir des 2e et 4e Bataillon du Régiment de Guyenne. De 1776 à 1783, il est cantonné à la Martinique où il se bat contre les Anglais. Puis il tient garnison à Boulogne, Calais puis Dunkerque à partir de 1788. Après la révolution, en 1791, il devient 22ème Régiment d'Infanterie de ligne. En 1792, il est cantonné à Saint-Omer. Il participe à l'expédition de Trêves dans l'armée de 22e RI le drapeaula Moselle et la même année, son 1er Bataillon est à Valmy, tandis que le 2ème se bat à Jemmapes et participe au siège de Lille. En 1793, ce dernier se bat dans le nord à Hondschoote. Puis, une réorganisation l'amalgame dans la 44ème Demi-brigade de ligne en 1796. En 1794, on la retrouve dans l'armée du Nord, puis en 1798, elle participe à la campagne d'Egypte où elle combat dans la bataille des Pyramides le 21 juillet. En 1800, elle est à Montebello et Marengo. En 1803, elle redevient régiment. De 1806 à 1807, l'Unité se bat contre les Prussiens et les Russes puis en 1813, elle est en Allemagne où elle s'illustre à Lützen et prend part à la Bataille de Leipzig du 16 au 19 octobre. Le régiment se bat à Maastricht en 1814, puis est dissous en 1815. Le régiment est reconstitué en 1820 à partir des éléments de la Légion d'Isère et, en 1832, il combat en Espagne, puis en Belgique, à Anvers, avant d'être envoyé en Algérie pour participer à la conquête de 1839 à 1846. En 1847, revenu en Métropole, il est en garnison à Lyon. Déplacé à plusieurs reprises, il participe à la campagne d'Italie en 1859.

 

LA GUERRE DE 1870

 

Durant la guerre de 1870, il est dans l'armée de Chalons où il est inclus dans la 1ère Division d'infanterie. Il se porte à l'Est où, fin août, il combat sur la Meuse, à Mouzon, Douzy et Sedan où ses éléments sont faits prisonniers. Reformé en 1871 au Puy, il est en garnison à Montélimar et à Valence de 1873 à 1874, puis déplacé à Briançon et Gap jusqu'en 1875, et enfin à Lyon et Romans jusqu'en 1881. Il participe à l'expédition de Tunisie en 1881 – 1882, puis revient à Lyon et à Vienne. De 1893 à 1902, il est stationné à Gap où il est inclus dans les troupes alpines. Fort de quatre bataillons, il est envoyé à Bourgoin et au camp de Sathonay jusqu'à la mobilisation de 1914.

 

LA GRANDE GUERRE

 

En 1914, du 3 au 16 août, est constitué à Rouen et Oissel, le 22ème Régiment d'Infanterie Territorial. Le 17 du même mois, il est transporté par train à destination d'Arras où il débarque le 18. Le 20, il fait mouvement sur Noyelle-sur-Lens, puis sur Pont-à-Vedin  le 21. Jusqu'au 27 août, il prend position le long des canaux de la Deule pour en assurer la garde. Le 27, deux de ses Bataillons embarquent à Lens à destination de Pont-Rémy d'où, à marche forcée, ils rejoignent Fresne-le-plan le 5 septembre où ils sont rejoints par le reste de l'Unité. Il reste au repos sur place jusqu'au 9, date à laquelle il fait mouvement sur la Somme et le 19, il arrive à Villiers-Bretonneux. Le 26 septembre, après avoir assuré quelques travaux de défense, le régiment se porte sur le front Ginchy-Lesboeufs. A Longueval, il est accroché par des éléments allemands. Le combat s'engage sous un tir intense d'artillerie ennemie et se poursuit jusqu'à la nuit tombée. Le soir, le régiment à repoussé l'adversaire au prix de 25 tués, dont deux officiers, et 132 blessés. Il cantonne sur sa position à Longueval. Le 27, il fait mouvement sur Bouzincourt. Le 29, le régiment est à nouveau au contact de l'ennemi et perd encore sept officiers, dont un tué. Au total, du 27 septembre au 4 octobre, l'unité va déplorer la perte de 346 hommes, dont 21 tués et 146 disparus.

Du 9 au 20 octobre, le régiment est toujours en première ligne, puis le 21, il fait mouvement sur Bus-en-Artois où il est mis en repos jusqu'au 23, puis se déplace sur Montdidier où il arrive le 31. Après avoir participé à la construction d'une ligne de défense, il est déplacé en première ligne à Thiescourt où il prend position le 11 novembre. Il y reste jusqu'au 2 janvier 1915 puis le 5, il fait mouvement sur le secteur de Foncquevillers-Monchy où, jusqu'au 12 mars, il subit à nouveau la perte d'une vingtaine d'hommes. Puis, on retrouve l'Unité sur le secteur de Thiepvalle la Boisselle où jusqu'au 31 juillet, il déplore la perte de 194 hommes, dont 26 tués et un disparu.

Le 13 août, le régiment est envoyé en Champagne. Il arrive à Somme Tourbe le 17. Après avoir été employé à des travaux de défense, il est à nouveau envoyé en première ligne où à partir du 25 septembre, il combat au prix de lourdes pertes soit, au 19 octobre, un total de 304 hommes, dont 68 tués et 5 disparus. Jusqu'au 1er mai 1916, il est positionné en deuxième ligne, mais durant cette période, il perd à nouveau 190 hommes, dont 48 tués. Du 15 mai au 11 juin, il est mis alternativement au repos et participe à divers travaux de défense. Puis, il fait mouvement sur le secteur de Verdun où il arrive le 15 juin. A partir du 23 juin, il va s'illustrer dans les combats durant huit mois, puis il est relevé le 14 février 1917 après avoir perdu 421 hommes dont 69 tués.

Envoyé en Seine et Marne, il est mis au repos jusqu'au 27 février, employé à divers travaux jusqu'au 13 avril. Puis, il est déplacé sur le secteur de l'Aisne et au Chemin des Dames où ses compagnies se voient confier diverses missions, notamment de DCA et Fourragère aux couleurs de la médaille militairede transport de munitions jusqu'en décembre. Entre temps, le 14 novembre 1917, le régiment est cité à l'ordre du Corps d'Armée.

Jusqu'au 28 mars 1918, les bataillons du régiment vont être séparés et sont positionnés dans des secteurs différents. Le 24 mars, le 1er Bataillon est engagé dans la Somme. Du 26 au 30, il combat successivement à Roye, à Tilloloy et Dancourt, puis à Rollot et Mortermer. En six jours, il perd 202 hommes, dont huit tués Et 191 disparus. Puis, il est envoyé au repos et reprend le combat. Le 27 mai, à la suite d'une forte contre attaque ennemie, le Bataillon est contourné, 281 hommes en ligne, dont leurs neuf officiers, sont fait prisonniers. Les rescapés sont aussitôt envoyés en Alsace, sur le Fourragère aux couleurs de la croix de guerresecteur de Thann et répartis dans d'autres unités. Le 12 juin 1918, le bataillon est dissous.

Quant au 22ème Régiment d'Infanterie, qui a lui aussi combattu avec vaillance au prix de très lourdes pertes en  Champagne, à la Malmaison, à Reims et dans la Somme, il va participer au défilé de la victoire le 14 juillet 1919 après être entré à Metz en décembre 1918. Il est dissous à la Valbonne le 1er Janvier 1922. Durant le conflit, il a gagné le droit au port de la fourragère aux couleurs de la médaille militaire, à la fourragère aux couleurs de la Croix de Guerre et s'est vu décerner quatre citations à l'ordre de l'Armée.

 

 

LA BATAILLE DE FRANCE 


Le 22 août 1939, le Centre Mobilisateur d'Infanterie 202 d'Haguenau forme le 22ème Régiment d'Infanterie de Forteresse qui reste en position sur le secteur de la ligne Maginot bombardée à partir du 15 juin 1940. Malgré une défense héroïque, le régiment est contraint à la reddition par la signature de l'armistice et il est entièrement fait prisonnier.

 

DE LA GUERRE D'ALGERIE A NOS JOURS

 

En mai 1956, le 22ème Régiment d'infanterie est reconstitué à trois bataillons avec des rappelés de la 8ème Région Militaire. Puis, il est envoyé en Algérie et basé à Ténès, ses éléments quadrillant un secteur entre Cherchell et Orléansville. Fin 1961 et début 1962, les 1er et 3ème Bataillons sont dissous. Le 2ème Bataillon devient 22ème Bataillon d'Infanterie. En janvier 1964, il est rapatrié en Métropole et dissous.

Durant ce conflit, l'Unité va déplorer la perte de 279 hommes.

Reformé en 1966 au camp de Sathonay, le 22ème Régiment d'Infanterie est à nouveau dissous le 1er octobre 1968, ses éléments formant alors le 99ème Régiment d'Infanterie; En 1964, le groupement des moyens régionaux n°5 prend l'appellation de GMR 5/22ème RI, puis à la suite de la réorganisation des armées en 1991, il est dénommé 22ème Régiment d'Infanterie. En 1992, il redevient 22ème Bataillon d'Infanterie, lui-même dissous en 2010, ses éléments formant le groupement de soutien de la Base de Défense Interarmées Lyon-Mont-Verdun.

 

                                                                                  Jean Louis CERCEAU

 

L'EMBUSCADE DU 9 JANVIER 1959 AU CAP TENES

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UN NOUVEAU TEMOIGNAGE SUR L'EMBUSCADE

DU 9 JANVIER 1959 ENTRE TENES ET LE CAP TENES

 

J'ai déjà publié sur le blog plusieurs articles qui traitent de cette embuscade.

 

Dans l'ordre de parution :

 

- Le 15/02/2009. Le phare du Cap Ténès.

- Le 24/06/2009. Une station radio goniométrique au sommet du Cap Ténès.

-Le 16/03/2010. Témoignages sur l'embuscade du 9 janvier 1959 entre Ténès et le Cap Ténès.

 

Je viens d'être contacté par Claude GUY qui se trouvait dans le convoi, et qui fait partie avec une dizaine d'autres des rescapés de cette embuscade.

 

Je lui laisse la parole.

 

Claude GUY.

Extrait de mes mémoires écrites en 2011 et 2012, en hommage à mes amis décédés.

 

…….Après 3 mois de ce régime, l'avion me reconduit à ma base et j'en profite pour passer les pelotons.

 

Nouvelle affectation : un poste isolé en montagne a subi des pertes le 25 septembre 1958, cinq aviateurs sont tués dans une embuscade entre le poste bas et le centre "gonio" situé au sommet du Cap Ténès.

Ce poste se situe à environ 6 kms à l'Est de la ville de Ténès, en bordure de côte, entre Alger et Oran ; il faut remplacer les morts.

Un camion nous conduit à cette unité en passant par Orléansville, la route côtière est fermée à cause des embuscades permanentes dans cette zone, les rebelles sont nombreux et bien armés.

 

Sur nos gardes, nous traversons les montagnes et enfin nous arrivons dans ce poste réparti en deux positions, l'un près de la mer pour le stockage des besoins d'environ 30 soldats.

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Le poste de bord de mer. Photo Claude Guy.

 

L'autre au sommet de la montagne, qui abrite une station "gonio" pour diriger les avions.

 

Seule une surface de 100 m2, est disponible sur ce piton rocheux avec des à-pics impressionnants, un petit baraquement en pierre avec terrasse plate, les fenêtres masquées par des sacs de sable, une seule piste en terre et rocher donne seulement l'accès à un véhicule militaire Dodge 4x4 une fois par semaine pour le ravitaillement et le gasoil du groupe électrogène qui tourne en permanence.

 

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Le poste haut.  Photo Claude Guy.

 

Un poste de tir protégé par des sacs de sable pour le fusil mitrailleur est installé sur la terrasse pour les gardes de nuit.

Une guérite avec un garde armé protège l'entrée du poste, les gardes se succèdent toutes les deux heures, c'est monotone.

 

 CAP TENES LE PHARE

Le poste bas est bien visible à l'est du phare.

Le poste haut est à la pointe rocheuse la plus haute.

Photo site 22 RI.

 

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Le poste bas, un carré visible sur la droite du phare.

Photo Claude Guy.

 

Un bouc fait partie de l'effectif et de nos dérivatifs, il est remarquable pour voler les pommes de terre du cuisinier et partir les déguster, les quatre pattes posées sur la pointe d'un rocher inaccessible. Il doit avoir un ancêtre chamois !

 

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Avec le bouc au poste bas. Photo Claude Guy.

 

Dans la nuit les chacals viennent manger nos restes de repas : c'est l'occasion de tirer  et de réveiller tout le monde, il suffit de dire "j'ai vu bouger dans les rochers et j'ai tiré", tout le monde saute du lit puis retourne se coucher en maugréant ; c'est un dérivatif fréquent, ainsi que le tir des vautours qui tournent en rond toute la journée sur nos têtes, parfois ils se posent sur une arête rocheuse.

 

J'ai l'occasion d'en ajuster un au fusil Mas 36 et le laisse sur place avec un tir à 200 mètres, je souhaite le récupérer et pars attaquer l'escalade des rochers presque verticaux à mains nues sans équipement, j'arrive sous le surplomb mais ne peux atteindre ma proie, un regard en dessous m'inquiète, je suis très haut: trente à quarante mètres, mes jambes commencent à trembler, je dois maîtriser cette appréhension avant d'attaquer la descente qui fut très longue, il et plus facile de monter que de descendre.

J'ai enfin réussi à en tuer un au vol sur nos têtes, il mesure 3,50 mètres d'envergure mais il est intouchable tant il pue la charogne.

 

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Le vautour. Photo Claude Guy.

 

Un avion de chasse T6 vient régulièrement nous rendre visite en vol, au ras du poste à notre hauteur, nous échangeons un signe d'amitié et il repart.

 

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T6 en observation du secteur. Photo Claude Guy.

 

J'apprends par un sous officier comment s'est effectuée l'embuscade précédente du mois de septembre 1958, 5 morts. Les soldats montaient le matin avec le soleil dans les yeux pour approvisionner le poste haut et sur un mamelon les rebelles attendaient cachés derrière les rochers. Des tirs violents éclatent, tout le monde se jette à plat ventre et riposte, les rebelles se retirent, le sous officier de carrière présent est décoré.

 

Cà devient de la routine, toutes les semaines ou les 15 jours, je ne me souviens plus, nous nous rendons en convoi à Ténès depuis le poste bas pour nous approvisionner, faire les courses personnelles et pour beaucoup en fonction de nos moyens, aller à l'église !!..

Nous sommes la plupart équipés d'un pistolet mitrailleur Mat 49, avec les deux sacoches de chargeurs, c'est encombrant pour aller prier !!... un collègue doit garder l'arme.

 

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Pistolet mitrailleur Mat 49.

 

Un half-track, équipé de deux mitrailleuses jumelées, ferme le convoi et, en raison des risques d'embuscade, un avion de chasse T6 vient survoler la colonne de 6 à 8 véhicules en moyenne composée de DODGE 4x4, GMC, Jeep.

 

La vie est monotone ; nous sortons rarement du poste, la pêche à la grenade le long des falaises nous permet d'avoir du poisson frais mais avec l'obligation de sauter à l'eau attaché à la taille par un fil pour être récupéré dans les vagues avec le poisson.

 

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Repas au poste haut quelques jours avant l'embuscade.

 

Un ami Maurice L.., servant l'une des mitrailleuses de l'half-track part en permission, je me propose de suite pour prendre sa place dont l'avantage est d'être porteur d'un pistolet 9mm moins encombrant pour circuler en ville et nous rendre à l'église!!...

 

Le convoi se met en route et serpente sur la piste pour aller au ravitaillement et récupérer un militaire condamné à quelques jours de tôle à Ténès.

 

Nous arrivons au centre ville et pendant le chargement nous en profitons pour faire nos courses personnelles et finir à notre lieu de culte habituel qui n'avait pas la qualité de ceux d'Alger… mais nous sommes déjà en retard sur l'horaire. Vite nous courrons vers le convoi, l'adjudant est en rogne, nous sautons dans notre engin blindé et, pour la première fois, il nous fait passer les premiers. Décision d'humeur qui m'a sans doute sauvé la vie.

 

L'avion de chasse T6 n'est pas au rendez vous.

Nous sommes en fin d'après midi le 9 janvier 1959, les véhicules serpentent dans la montagne , le côté droit de la piste est déboisé sur une vingtaine de mètres et à gauche un talus, parfois une murette et des bois.

Quand tout à coup, c'est une cadence de tir impressionnante en notre direction, le véhicule Dodge qui nous suit est le premier touché par une mitrailleuse postée en hauteur à environ cent mètres ; le chauffeur à la tête dans le volant, deux soldats sont morts dont Michel Lacassin sans arme assis derrière le chauffeur, d'ailleurs des taches de sang apparaissent sur la photo du 4x4, je vois le sergent Dousset Marcel s'éjecter et passer devant le véhicule pour sauter en bas de la route, il prend une rafale dans le dos et s'écroule. Il prendra dans la mort une teinte noire que je n'ai jamais observée parmi tous les morts qui ont jalonné ma vie, je lui fermerai les yeux. Le lendemain je compterai une vingtaine d'impacts de balles dans le 4x4.

 

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Photo du Dodge 4x4 qui nous suivait, prise le lendemain.

Les ronds à la craie entourent les impacts de balles. Photo Claude GUY.

 

Dès la première détonation, j'ai armé la mitrailleuse à deux tubes et arrosé la lisière d'où venaient les tirs, la deuxième mitrailleuse, servie par un soldat de la marine, a fait de même; les soldats ont sauté dans les broussailles sous la route et commencé à tirer avec leurs armes individuelles. Notre chauffeur, paniqué à sauté dans les bois et disparu.

Sans chauffeur, je saute au volant pour reculer et essayer de donner un coup de main aux collègues dans les véhicules qui nous suivaient, mais nous ne pouvions pas voir le reste de la colonne, nous étions dans une courbe et très vite bloqué par le 4x4 et le corps du sergent. Nous sommes contraints de rester en position. Nous sommes pris à partie par des tirs directs, les balles sonnent contre les tôles de l'engin.

Les mitrailleuses nous posent des problèmes de chargeurs (dit camemberts car circulaires) les balles rentrent de travers et nous devons bricoler, ce n'est pas le meilleur moment pour la mécanique.

 

Des gendarmes mobiles, dans leur caserne de Ténès, alertés par les détonations sont venus au bout d'une demi-heure, nous donner un coup de main, équipés de véhicules blindés, dès que j'ai entendu les canons qui les équipent se mettre en action, j'ai senti un soulagement car j'étais persuadé que c'était la fin pour nous. (Avec une balle de 9mm toujours dans la poche, je ne serai pas pris vivant, nous avions connaissance des tortures infligées).

 

Ils remontent la colonne en tirant, un lieutenant saute de son engin et déplace les morts étalés sur la piste pour faire passer les engins, ils arrivent jusqu'à nous et nous disent "beaucoup de dégâts".

Je demande à l'un des premiers "sauveteurs", des munitions pour mon Mac 50, mes chargeurs sont vides, il me donne un de ses chargeurs de Mat 49 pour me réapprovisionner en 9mm.

 

Je vais constater les dégâts et vois un sergent blessé par une balle qui a percuté la crosse de son pistolet mitrailleur en bloquant la sécurité et en lui coupant un doigt, il me dit : "je l'ai échappé belle, plus d'arme, j'ai sauté du camion et me suis enfilé sous le pont arrière du 4x4, j'ai fait le mort, un fellous a lâché une rafale et m'a pris par les pieds et tiré hors du véhicule, ensuite il a récupéré mes lunettes et ma montre".

En l'observant je constate que 2 balles ont traversé ses vêtements sans le toucher, il revient de loin.

Je pense que cette boule de feu autour de l'half-track à dissuadé les fells de nous prendre d'assaut pour récupérer les armes du 4x4, le seul véhicule que nous pouvions voir.

 

Cette embuscade bien montée fait mal; "les fellous" sont repartis avec des armes mais pas de grenades. Nous n'en sommes pas équipés car par expérience elles sont utilisées pour les attentats en ville.

Sauf que pressentant une attaque, à ma demande, discrètement l'armurier m'avait remis une grenade défensive que je n'ai pas eu à utiliser.

 

L'adjudant Chapoulot commandant le poste est mort : il conduisait le dernier véhicule, une jeep où était concentré le maximum de tirs, habituellement c'était l'half-track qui fermait la colonne, le soldat à sa droite qui l'accompagnait, équipé d'un fusil mitrailleur est lui sérieusement blessé au bras, il a jeté son arme dans les fourrés et à rejoint la ville par les bois, nous récupérerons l'arme le lendemain, à l'arrière le soldat Bertaux Bernard est sauf, sa Mat 49 à fait office de bouclier et le gardien du phare André Dominici est mort.

 

Un vieil arabe et un enfant arrivent sur la piste, l'adulte ne pouvait pas ne pas être alerté par ce qui venait de se passer : certainement envoyé pour constater les résultats de cette attaque, il va passer un très mauvais moment.

 

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Photo d'un half-track prise dans la base. Photo Claude GUY.

 

Les blessés sont rapidement évacués vers les services sanitaires.

Les morts chargés dans les véhicules et les camions retirés des fossés et remorqués à Ténès où nous passerons la nuit dans une caserne de l'armée de terre.

 

Le bilan est lourd, huit morts, de nombreux blessés, des armes récupérées par les rebelles qui ont donné l'assaut après les premiers tirs très meurtriers, des véhicules sont inutilisables.

 

Nous ne reverrons plus les blessés, et resterons sans nouvelle d'eux, la vie continue.

 

Les morts seront réunis à Ténès pour une cérémonie funèbre, un lieutenant colonel beau frère du sergent Dousset sert la messe (sous réserve, enregistré dans mes neurones), nous sommes au garde à vous, et je promets de…..

 

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Cérémonie funèbre, je suis dans l'angle de la pièce. Claude GUY.

 

Le lendemain matin, nous rejoignons notre poste escortés par les véhicules blindés de la gendarmerie mobile.

 

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    Photo du retour à notre poste le lendemain. Claude GUY.

 

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Lieu de l'embuscade, l'half-track se trouvait au sommet et le 4x4 dans la courbe. Claude GUY.

 

Très rapidement la décision est prise par l'état major d'évacuer ces deux postes définitivement.

Les hélicoptères Sikorsky en vol stationnaire, il n'y avait pas de place pour se poser, se chargent de transporter le matériel du piton au poste du bord de mer que nous rejoignons tous.

 

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     Les Sikorsky en action.

 

Je dois rejoindre un hélico avec paquetage pour évacuer, et rejoindre la base principale pour une nouvelle mutation : c'est le survol des montagnes et nous rejoignons la plaine de la Mitidja.

 

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Hélico au départ de Ténès. Photo Claude GUY.

 

L'armée dans sa grande mansuétude ! M'accorde une permission de 8 jours pour la France. Notre embuscade est mentionnée dans les journaux métropolitains, quelques blessés parmi les forces de l'ordre (il ne faut pas apeurer la population et donner des informations au FLN).

 

Un peu d'humanité dans ce monde de brutes !

 

Je rejoins la maison de mon père veuf, il est absent : je l'attends devant la maison et l'aperçois qui monte lentement sur le trottoir. Soudain il se fige sur place en me voyant, la veille la gendarmerie venait de lui annoncer ma mort en Algérie, c'est la seule fois que j'ai vu pleurer mon père….. (La grande muette fait parfois des erreurs, je lui pardonne).

 

Je retrouve ensuite ma vieille grand-mère Philomène qui est à l'hôpital, c'est elle qui m'a élevé, elle est heureuse de me voir, elle est très proche de sa fin de vie, en est consciente mais me dit ne rien craindre. Très croyante elle est convaincu d'être attendue par son Dieu.

Après avoir subi toute cette période, mon Dieu personnel déjà en filigrane, en a pris un sacré coup.

 

Ma grand-mère bénéficiait d'une petite pension qu'elle distribuait autour d'elle. Elle cherche dans les replis de son lit d'hôpital et me tend un billet de 10 000 francs (1959); "Je savais que tu viendrais (Dieu avait dû la prévenir) et je t'attendais pour te les donner", je l'embrasse et éclate en sanglots, la mort est toujours présente autour de moi, le "guerrier" se lâche après ces périodes difficiles.

 

Elle décèdera trois mois après, le 12 avril 1959.

 

Retour de permission.

 

L'armée veut toujours des responsables concernant la dernière embuscade, le sergent décoré depuis peu est mis en cause : il aurait dû donner l'assaut comme il restait le plus gradé et le plus ancien. Ce serait à éclater de rire si ce n'était pas si grave. Il sera traduit devant le tribunal militaire, et je serai cité comme témoin avec le chauffeur et un autre soldat. Le général VEISS sera son avocat.

 

Je suis super révolté.

 

Son avocat nous dit : "vous ne pouviez pas agir autrement ce type d'embuscade bien préparée est toujours très meurtrière".

 

Je suis cité, on me donne la parole, je dis des choses désagréables.

 

Un grand silence, on me demande de sortir, un lieutenant colonel vient me voir dehors et me dit entre les dents: "GUY nous nous retrouverons".

 

Je n'en avais rien à faire, j'étais un appelé…..

 

….Il me sera difficile de croire à la justice militaire.

La plaidoirie  de son avocat n'avait rien changé.

 

Ces massacres sont l'occasion pour l'état major d'organiser de grosses opérations dans cette région avec le 1er REP, le commando Vietnamien et le 22ème RI. Ils feront un excellent travail, 67 rebelles abattus dont le chef dénommé Menouar, les mitrailleuses qui avaient participé à notre attaque ont été récupérées : il me semble des MG à hautes cadences de tir (1200 coups minute), les rebelles étaient mieux équipés que nous.

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Pas de graisse excédentaire. Photo Claude GUY.

 

Dans mes mémoires réservées à ma famille, je parle souvent d'équipe, les hommes se protègent entre eux avant toute considération politique.

Comme dans toute guerre, il y a des moments difficiles mais aussi des périodes de fêtes parfois excessives;

 

Je quitterai l'armée en mai 1960 et resterai en Algérie pour créer avec quelques amis des activités commerciales.

C'est une autre aventure…. Qui se termine le 3 juillet 1962 dans l'anarchie, et les meurtres les plus horribles….

Rentrée en France difficile, j'ai 28 ans, plus d'argent mais la vie sauve…

 

En fonction des circonstances, l'homme est capable du meilleur et du pire, il est inutile de rechercher dans le passé, c'est toujours d'actualité.

 

 

J'ai clos mes mémoires par ce paragraphe.

 

 

Synthèse partielle du déroulé d'une vie, il sera fait abstraction de toute critiques vis-à-vis des personnes à tous niveaux rencontrées, des proches et des moins proches, je n'ai pas de compte à régler, la fin est proche.

 

Si les sentiments ne sont pas exprimés, ce sont peut être les traumatismes de l'enfance, ou de l'atavisme, ils sont néanmoins présents.

 

De ce long parcours fait de joies et de drames je retiendrai que la vie de chacun est faite de beaucoup de hasard et qu'il ne faut jamais choisir la voie la plus facile, elle est très encombrée.

 

 

                                               21/12/2012   Claude GUY

AVENUE DU 22ème RI A GOURAYA

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AVENUE DU 22ème R.I. A GOURAYA

Gouraya avenue du 22ème R.I. Xavier Marty  Ce document m'a été communiqué par Xavier MARTY par l'intermédiaire de JC PICOLET.

 

Allee-des-Palmiers-GOURAYA-C.ROCHARD.jpg

         L'Allée des Palmiers à GOURAYA

 

        Photo Claude ROCHARD

UN NOUVEAU TEMOIGNAGE SUR L'EMBUSCADE DU 28 02 57

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L'EMBUSCADE DU 28 FEVRIER 1957

SUR LA PISTE DUPLEIX - BOUYAMENE

 

Pour compléter le récit J.C. Picolet voici les interventions et les opérations qui ont été menées, à partir du camp de Béni Bou Hanou, auxquelles toute la section a participé après l'embuscade de Dupleix.

 

Notre section la 4ème faisait partie de la 2ème compagnie située à Bou Yamene, mais détachée au camp de Béni Bou Hanou, situé à mi-chemin sur la piste Bou Yamene/Tazerout. Nous sommes arrivés en décembre 1956 pour relever les rappelés, et quitter ce camp en juin 1957 pour la ferme Maître.

la-ferme-MAITRE-a-GOURAYA-photo-C.ROCHARD.jpg     La ferme Maitre (photo Claude Rochard)

Le convoi de ravitaillement montait chaque semaine jusqu'à Béni Bou Hanou pour nous ravitailler, je connaissais plusieurs camarades et gradés qui ont été tués dans l'embuscade.

Camp-de-BENI-BOU-HANOU-2eme-Cie-photo-C.ROCHARD.jpg

     Camp de Beni Bouhanou (photo Claude Rochard)

 

Dans la liste de ces malheureux figurent deux camarades de notre section qui avaient pris le convoi pour descendre à Gouraya.

Paul Lafitte pour des soins dentaires, il a été blessé, et est décédé suite de ses blessures le 03 mars 1957 3 jours plus tard à l'Hôpital Maillot Alger.

Robert Bories permissionnaire libérable, a été tué dans cette embuscade, il rentrait en France.

Paul Lafitte   Robert-Bories-.jpg

 

Il est exact que les permissionnaires descendaient à la C.C.A.S sans arme, ils n'auraient donc pas pu riposter.

 

 

A l'époque le nombre de fellaghas en embuscade avait été estimé à cent vingt, nous connaissions bien cette piste pour l'avoir prise plusieurs fois. Les taillis et les buissons assez denses arrivaient jusqu'aux aux de bords de la piste, c'est ce qui a sans doute permis aux attaquants de mieux se dissimuler ?

Après l'embuscade les versants ont été déboisés de chaque côté sur environ sur 30 mètres.  

Dés la connaissance de l'embuscade des opérations de bouclage, et de ratissage ont été immédiatement mise en place pour l'ensemble du 1er bataillon.

Béni Bou Hanou

La piste Bou-Yamène Dupleix à une distance d'environ 20 Kilomètres, à chaque fois que le convoi montait la moitié de notre section partait pour la journée en protection sur les crêtes surplombant la piste. Je ne connais pas le point kilométrique où se trouvait notre groupe ce jour là, mais je pense qu'il devait-être assez éloigné du lieu de l'embuscade.  

L'autre groupe dont je faisais partie, était resté de garde au poste. Vers 15 heures, nous avons vu arriver par la piste venant de Tazerout un convoi d'une dizaine de G.M.C. qui amenait en renfort une compagnie de tirailleurs sénégalais, ils sont aussitôt partis en ratissage, (voir photos)

BENIBOUHAOU-Camions-des-Senegalais.jpg

     Convoi des tirailleurs Sénégalais à Béni Bou Hanou (photo Claude Rochard)

A aucun moment nous n'avons vu de troupes héliportées sur notre secteur.

Le soir en revenant au camp, les tirailleurs sénégalais, ont ramenés une quinzaine de suspects et un camarade mort René Presle, les prisonniers ont été interrogés par le chef de section le lieutenant Christian Pasteau, (Saint-Cyrien)

Béni Bouanou interrogation par le Lt Pasteau de suspect ap

     Interrogation d'un suspect par le lieutenant Pasteau (photo Claude Rochard)

Ce lieutenant après avoir servi au 22ème R.I. a été affecté par la suite au 1er régiment étranger de parachutistes, il a été tué le 19 décembre 1959 à Zéralda région de Cherchell

Christian-Pasteau-parcours.jpg 

Vers 20 heures notre groupe (10 hommes) qui était resté au poste dans la journée, dirigé par le sergent Hébert a reçu l'ordre d'aller monter une embuscade, à la jonction de deux sentiers muletiers, éventuels chemins de repli des fellaghas.

Nous sommes restés en position jusqu'à 1 heure du matin, étant à découvert, nous avons été obligés de décrocher car la situation devenait dangereuse, deux T6 nous ont survolés à plusieurs reprises et ont commencé à lancer des lucioles, ces dernières éclairaient la nuit comme en plein jour. Nous avons cru être repérés et pris pour des rebelles, Le sergent a jugé plus prudent de redescendre se mettre à l'abri sur la piste en contre bas.

Camps de Bou Yamene et de Dupleix (ferme Buthiaux)

Dans son compte-rendu le commandant Cailhol indique que la section du lieutenant Christman de la 2ème compagnie de Bou-Yamène et la 3ème compagnie du capitaine Medy de Dupleix sont arrivés en renfort sur les lieux 15 à 20 minutes plus tard pour dégager les survivants. Un de mes camarades venu de France avec moi, faisait partie de la section Christman.

Louda Louze

Pour la 1ère compagnie postée à cette époque à Louda Louze, nous n'avons eu aucun renseignement sur sa participation aux recherches des H.L.L.

Après l'embuscade, nous sommes restés trois semaines sans être ravitaillé, notre approvisionnement c'est ensuite fait par parachutage depuis un Nord Atlas et cela jusqu'à fin juin 1957 date de notre départ pour à la ferme Maitre

près de Gouraya.

Ravitaillement-de-BENI-BOUANOU-par-un-nord-atlas.jpg

 Nord Atlas ravitaillant le poste après l'embuscade (photo Claude Rochard)

 

Aïssa choc des cultures.

50 ans après cette guerre un Chouf qui avait 11 ans en 1957 raconte un événement qui se serait produit après l'embuscade. Ce récit est paru dans le nouvel Obs du 17 septembre 2008.

 

Pendant mon séjour au 22ème nous n'avons jamais eu connaissance de ce fait, les autorités ont-elles voulu taire cet évènement ? 

Cet ancien chouf indique dans son récit qu'un jeune soldat français, aurait été fait prisonnier lors de la bataille de Bou-Yamène et aurait été emmené à travers le djebel pendant 15 kilomètres, pour rejoindre le village Hayouna, situé dans l’arrière pays de l'Oued Messelmoun.

Ce prisonnier n'est pas René PRESLE, que les tirailleurs sénégalais ont retrouvé mort sur le lieu de l’embuscade et qu’ils ont ramené le jour même à Béni Bou Hanou. J'étais présent quand l’infirmier a soulevé la toile de tente qui le recouvrait, il était sur une civière encore habillé de son treillis, et de son casque, mais il ne portait aucune trace de lapidation.

Claude Rochard

 

 

L'EMBUSCADE DU 28 FEVRIER 1957 PISTE DE BOUYAMENE A DUPLEIX

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L'EMBUSCADE DU 28 FEVRIER 1957

PISTE DE BOUYAMENE A DUPLEIX 

Page de couverture livre Picolet

 

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 Page 4 de couverture livre Picolet

 

 

 

 

 

 

  Embuscade de Lalla Ouda

 

 

 

Le 28 février 1957, sur une piste, dans un coin perdu du djebel algérien, près du mausolée d’une sainte femme, Lalla Ouda, une embuscade fut tendue pour intercepter et détruire un convoi militaire du 1er Bataillon du 22e RI.

 

Un événement fréquent à l’époque en AFN, en somme un banal fait divers dont pratiquement  personne n’entendit jamais parler. A ceci près toutefois que ce drame, un des plus meurtriers de cette guerre, laissa sur le terrain 30 « Morts pour la France », 13 blessés et 17 rescapés marqués voire traumatisés à vie.

 

Plus d’un demi-siècle plus tard, un officier de réserve qui servit en 1960/61 dans cette unité en tant que chef d’une harka composée d’une soixantaine de supplétifs autochtones berbères, décida de tirer cette tragédie de l’oubli dans lequel elle avait été méticuleusement mais sournoisement plongée.

 

Une longue quête débuta et se déroula durant des mois. Mais elle permit avec beaucoup de travail et surtout énormément de chance de recueillir moult témoignages de nombreux intervenants y compris émanant de certains de leurs adversaires.

 

Il en résulte un travail de romain par la mise en forme de la masse des informations et documents recueillis. Et tout autant un travail de bénédictin pour la synthèse minutieuse et détaillée à laquelle il aboutit.

 

L’étude qui en découle s’attache aux faits, uniquement aux faits. Elle décortique l’embuscade, l’examine sous tous ses aspects, dans ses moindres détails, depuis sa conception jusqu’aux conséquences qui en découlèrent y compris pour les intervenants et se livre à son analyse critique. Le tout avec force photos, cartes, croquis et documents divers.

 

Un Devoir de Mémoire, certainement unique en son genre par son ampleur, qui révèle ce que de jeunes hommes, à l’époque encore mineurs ou tout juste majeurs, qui n’avaient aucun droit, que des devoirs, ont fait le leur. Il est donc important que les générations qui ont suivi sachent ce qu’ils ont subi, enduré et souffert. Et qu’ils ne méritent absolument pas les propos pour le moins méprisants dont ils ont fait trop souvent l’objet. Bien au contraire.

 

Que grâce leur soit enfin rendue !

 

 

 

 

Caractéristiques techniques du livre : format A4 (21 x 29,7), 120 pages, poids 370 g.

 

Prix : 17 € + 6,80 € de port au tarif postal en vigueur à compter du 1/01/2015 en recommandé sans AR en R1. Cette formule est vivement conseillée. Tout autre envoi se ferait aux risques et périls du destinataire, le vendeur ne pouvant être tenu pour responsable d’éventuels incidents postaux. A noter qu’un envoi groupé permet de réduire considérablement le coût du port.

 

Paiement : uniquement par chèque tiré sur une banque installée en France.

 

Vente : par correspondance. S'adresser à J-C PICOLET :

adresse mail : chronique.de.gouraya@gmail.com

ou courrier postal : 4 rue de la Gare 78510 TRIEL-SUR-SEINE


NOUVELLE PRESENTATION DU BLOG

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NOUVELLE PRESENTATION DU BLOG

NOUVELLE PRESENTATION DU BLOG

OVER BLOG a mis en place une nouvelle version depuis déjà environ deux ans, accessible aux smartphones, et, m'a pratiquement mis en demeure d'y adhérer avant le 28 février 2015, sous peine de perdre des fonctions.

Je m'y suis donc plié, mais j'enregistre quelques déboires.

Au départ, les pages et les catalogues photos, avaient disparus, après réclamation, les pages ont été réintégrées par contre les catalogues photos n'étaient pas revenus.

Après plusieurs mails sans résultat, il m'a bien fallu me débrouiller seul. J'ai réussi à retrouver les brouillons des catalogues, et j'ai commencé à les réintégrer dans le blog. Actuellement, j'ai transféré 12 catalogues, et il m'en reste environ 7 ou 8 à traiter. C'est long et fastidieux. De plus certaines photos sont écornées, et l'on ne voit plus que la tête ou les pieds ! Je n'ai pas trouvé de solution pour y remédier. De même dans au moins un catalogue, j'ai trouvé des photos d'un autre.

La présentation, est moins conviviale. Auparavant une miniature de tous les catalogues apparaissait dans la marge droite du blog, l'on pouvait donc choisir, et visionner ce catalogue. Dans la nouvelle version, il faut rechercher toujours dans la marge droite du blog, dans la rubrique "CATÉGORIE" les "Albums" et cliquer dessus. Tous les albums s'ouvriront cependant le téléchargement peut être long.

Enfin, j'ai trouvé des articles ou les textes avaient été décentrés. Je pense pouvoir y remédier, cependant il me faudra tout d'abord les lister, puis les rectifier. C'est un travail long et fastidieux, et je vous remercie de patienter un peu.

J'espère que tous ces petits problèmes, ne vous écarteront pas du blog.

     

Michel FETIVEAU.

 

L'EMBUSCADE DU 19 OCTOBRE 1959 A L'OUED AMERI

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L'EMBUSCADE DU 19 OCTOBRE 1959

A L'OUED EL AMERI
PRES DE CAVAIGNAC

 

Cette embuscade m'a été rapportée par un rescapé, Yves CLISSON, et par l'officier qui commandait la section de secours qui arriva la première sur les lieux.

Elle concerne une unité du 3ème Bataillon, la 9ème compagnie en poste à CAVAIGNAC, qui après avoir ratissé toute la matinée, dans le secteur de TARZOUT avec la 12ème compagnie jusqu'en vue de la mer, regagnait son cantonnement aux environs de 18 heures.

C'est sur une piste parallèle à l'oued El Améri, (coordonnées de chasse: KY65 F 02-05) que les fells ont monté leur embuscade. Au niveau de l'oued, un Fusil Mitrailleur prenait la piste en enfilade. C'est la jeep du capitaine qui fut la première atteinte, et les quatre hommes dont le capitaine, le chauffeur, le radio, et un homme vde protection, furent tués dès le début de l'embuscade.

Un second groupe de fells placé sur un mamelon (cote 321) dominait le convoi et pris à parti plus particulièrement le GMC blindé dans lequel se trouvaient des harkis et des appelés du contingent.

Le blindage du Véhicule protégea les occupants qui s'étaient allongés le long des ridelles, mais dès qu'ils essayaient de le quitter, ils subissaient un feu violent d'armes automatiques. Le hasard leur sauva la vie, en effet les verrous de la porte arrière du GMC furent brisés par les tirs adverses, et la porte retomba, ce qui facilita leur fuite pour se réfugier, sous et derrière le véhicule, et organiser leur défense.

Dès le début de l'accrochage, le tireur du fusil mitrailleur fut tué. Son arme fut récupérée par le soldat Yves CLISSON qui la mit immédiatement en batterie et permis ainsi de tenir les fells à distance.

C'est un harki, qui s'est enfui et à rejoint en courant CAVAIGNAC pour donner l'alerte.

La 12ème compagnie qui avait rallié BENI TAMOU fut appelé en renfort en fin d'après midi par un message flash précisant les coordonnées de l'embuscade.

Cette embuscade fut très meurtrière, et on releva 13 morts dans nos rangs, dont le capitaine. Le convoi était constitué, d'une jeep, d'un GMC blindé, d'un renault 4 roues motrices, et d'un half-track armé d'une mitrailleuse 12/7.

 

Le second témoignage émane du Sous lieutenant BOUVIER Robert.

En poste à la 12ème compagnie à BENI TAMOU sous les ordres du capitaine HERY.

Nous avons participé à la même opération dans la forêt de TENES et du TARZOUT qui s'est terminée en fin de matinée du 19 octobre.

La 12ème compagnie à rejoint sa base en section étalée, alternativement en véhicules, et à pied en milieu d'après midi. Nous sommes donc tous passés sur le lieu de l'embuscade.

Nous avons procédé ensuite au nettoyage des armes, et à notre toilette et bénéficié d'un moment de détente en fin d'après midi.

Soudain un radio sort de la salle des transmissions et s'adresse à moi, premier officier qu'il rencontre : "Message flash, embuscade contre la 9ème compagnie à :KY 65 F 02-05".

Alerte, et rassemblement immédiat avec armes et munitions, sans prendre le temps de changer de tenue. Embarquement dans les véhicules. Très rapidement un GMC est plein avec les premiers arrivés quelque soit leur section. Partir très vite au secours des collègues prime le reste. Le capitaine m'approuve: "partez vite, je vous suis avec le reste de la compagnie".

Coupant court avant CAVAIGNAC, en dehors de la piste, nous sommes arrivés en position dominante sur le lieu de l'embuscade. Comme à leur habitude, les fells avaient fuit, et laissé de nombreuses femmes pour récupérer les armes et les vêtements des morts. Quelques coups de feu les mirent en fuite.

C'était la fin de l'après midi, soleil couchant. Rapidement nous fûmes rejoints par le reste de la compagnie commandée par le capitaine HERY. On se consacra à l'organisation des secours, les premiers soins aux blessés, et le regroupement des morts.

Des Nord 2000 sont intervenus toute la nuit pour larguer des lucioles, ce qui nous permis d'installer une "DZ" pour l'évacuation par hélicoptères des morts sur TENES, et des blessés sur l'hôpital d' ORLEANSVILLE.

Puis nous avons ratissé le djebel alentour pour récupérer des militaires qui avaient fui les lieux de l'embuscade pour se mettre à l'abri. Certains n'ont d'ailleurs été retrouvés que le lendemain matin.

 

         BOUVIER Robert  et Yves CLISSON.

 

 

 

CONNAISSEZ VOUS CE POSTE

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CONNAISSEZ VOUS CE POSTE

Un ancien élève officier de l'école de CHERCHELL, vient de publier dans la revue de l'école "CITADELLE" une photo qu'il a prise dans les environs de CHERCHELL.

Il pense qu'il s'agit d'un poste tenu par le 22ème R.I.

Si vous le reconnaissez, merci de m'en communiquer le nom, et approximativement où il se situe.

D'avance Merci.

Michel FETIVEAU

CONNAISSEZ VOUS CE POSTE

L'EMBUSCADE DU 19 OCTOBRE 1959 A L'OUED AMERI

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L'EMBUSCADE DU 19 OCTOBRE 1959

A L'OUED EL AMERI

 

Cette embuscade m'a été rapportée par un rescapé, Yves CLISSON, et par l'officier qui commandait la section de secours qui arriva la première sur les lieux.

Elle concerne une unité du 3ème bataillon, la 9ème compagnie en poste à CAVAIGNAC, qui

L'entrée du poste de Cavaignac. photo Yves Clisson

L'entrée du poste de Cavaignac. photo Yves Clisson

après avoir ratissé toute la matinée, dans le secteur de TARZOUT avec la 12ème compagnie jusqu'en vue de la mer, regagnait son cantonnement aux environs de 18 heures.

C'est sur une piste parallèle à l'oued El Améri, (coordonnées chasse : KY65 F 02-05) que les fells ont monté leur embuscade. Au niveau de l'oued, un Fusil Mitrailleur, prenait la piste en

Extrait de la carte d'Etat Major du secteur

Extrait de la carte d'Etat Major du secteur

enfilade, c'est la jeep du capitaine qui fut la première atteinte et les quatre hommes, dont le capitaine, le chauffeur, le radio, et un homme de protection, furent tués dès le début de l'embuscade. Un second groupe de fells placé sur un mamelon (côte 321) dominait le convoi et pris à parti plus particulièrement le G.M.C blindé dans lequel se trouvaient des harkis et des appelés du contingent.

Le blindage du GMC protégea les occupants qui s'étaient allongés le long des ridelles, mais, dès qu'ils essayaient de le quitter, ils subissaient un feu nourri d'armes automatiques.. Le hasard leur sauva la vie, en effet les verrous de la porte arrière du GMC furent brisés par les tirs adverses et la porte retomba, ce qui facilita leur fuite pour se réfugier sous, et derrière le véhicule et organiser leur défense.

Dès le début de l'accrochage, le tireur du fusil mitrailleur fut tué. Son arme fut récupérée par le soldat CLISSON Yves qui la mit immédiatement en batterie et permis ainsi de tenir les fells à distance.

C'est un harki qui s'est enfui et à rejoint en courant CAVAIGNAC pour donner l'alerte.

La 12ème compagnie qui avait rallié BENI TAMOU fut appelée en renfort en fin d'après midi par un message flash précisant les coordonnées chasse de l'embuscade.

Cette embuscade fut très meurtrière, et on releva 13 morts dans nos rangs, dont le capitaine.

Le convoi était constitué, d'une jeep, d'un GMC blindé, d'un Renault 4 roues motrices, et d'un half-track armé d'une mitrailleuse 12/7.

Le second témoignage émane du Sous Lieutenant BOUVIER Robert.

En poste à la 12ème compagnie à BENI TAMOU sous les ordres du capitaine HERY. Je lui laisse la parole.

Nous avons participé à la même opération dans la forêt de TENES et du TARZOUT qui s'est terminée en fin de matinée du 19 octobre.

La 12ème compagnie à rejoint sa base en section étalée, alternativement en véhicules et à pied en milieu d'après midi. Nous avons procédé ensuite au nettoyage des armes, et à notre toilette et bénéficié d'un moment de détente en fin d'après midi.

Soudain un radio sort de la salle des transmissions et s'adresse à poi, premier officier qu'il rencontre : "Message flash, embuscade contre la 9ème compagnie à  ; KY 65 F 02-05"

Alerte, et rassemblement immédiat avec armes et munitions, sans prendre le temps de changer de tenue. Embarquement dans les véhicules. Très rapidement un GMC est plein avec les premiers arrivés quelque soit leur section. Partir vite au secours des collègues prime le reste. Le capitaine m'approuve : "partez vite, je vous suis avec le reste de la compagnie".

Coupant court avant CAVAIGNAC, en dehors de la piste nous sommes arrivés en position dominante sur le lieu de l'embuscade. Comme à leur habitude, les fells avaient fuit, et laissé de nombreuses femmes pour récupérer les armes et les vêtements des morts. Quelques coups de feu les mirent en fiute.

C'était la fin de l'après midi, soleil couchant. Rapidement nous fûmes rejoints par le reste de la compagnie commandée par le capitaine HERY. On se consacra à l'organisation des secours, les premiers soins aux blessés, et le regroupement des morts.

Des Nord 2000 sont intervenus toute la nuit pour larguer des lucioles, ce qui nous permis d'installer une "DZ" pour l'évacuation par hélicoptères des morts sur TENES, et des blessés sur l'hôpital d'ORLEANSVILLE.

Puis nous avons ratissé le djebel alentour pour récupérer des militaires qui avaient fui les lieux de l'embuscade pour se mettre à l'abri. Certains n'ont d'ailleurs été retrouvés que le lendemain matin.

 

      Robert BOUVIER        Yves CLISSON

Le Poste de BENI TAMOU photo Louis Martin

Le Poste de BENI TAMOU photo Louis Martin

L'EMBUSCADE DU 04 MARS 1959

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L'EMBUSCADE DU 04 MARS 1959 SUR LA ROUTE DE FRANCIS GARNIER Le récit de cette embuscade m'a été communiqué par Robert PARADINAS qui se trouvait en poste à l'époque à MONTENOTTE. Je lui laisse la parole. Ce jour là, après une vaste opération infructueuse...
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