22ème R.I.
1er BATAILLON
1ère COMPAGNIE
Ce document a été composé essentiellement à partir de photos de différents
correspondants, publiées sur le blog du 22ème R.I. créé et animé par notre ami
Michel Fétiveau.
Par nature, les photos sont statiques, fragmentées et souvent abstraites car
extraites de leur contexte. En les regroupant, les classant et les commentant, l'auteur
de cet article a voulu recréer l'ambiance qui les a vu naître et donc les rendre, autant
que possible, concrètes, vivantes.
NOSTALGIE
En ce temps-là, j'avais vingt ans…..
En ce temps là, c'était Paris,
C'était la guerre en Algérie…
Pierre Bachelet.
NB.
Toutes les photos ont été attribuées à l'auteur lui-même ou à celui qui les a
présentées sur le blog.
En ce qui me concerne, la quasi-totalité des photos qui figurent à mon nom
m'ont, en fait, été offerte à l'époque.
collection J.C. Picolet
1er BATAILLON DU 22ème R.I. 1ère COMPAGNIE
Sous-quartier de Bou Zérou
CARTE RECONSTITUEE DU SOUS QUARTIER DE BOU ZEROU (collection J.C Picolet)
SOUS QUARTIER DE BOU ZEROU
Si le quartier de Gouraya est parfaitement défini, le sous quartier de Bou Zérou
n'a jamais été, a ma connaissance, expressément délimité.
Au sud aucune ambiguïté, c'est la route des crêtes qui va de 1040 à Tamzirt
puisque c'est la limite nord du secteur de Duperré.
A l'ouest nous avons toujours retenu la piste qui va de Tazzerout à Villebourg
prolongée au sud de Tazzerout jusqu'à 1040, englobant le haut de la vallée
de l'oued Bou Arbi.
Au nord, les repères sont plus flous. La limite englobe les douars de Solaya,
Beni Nador, Larioudrenne et enfin de Beni Ali avant de partir plein ouest vers
l'oued Es-Sebt.
A l'Est, à Tighret, nous en sommes toujours resté à l'oued Es-Sebt car nous
n'allions, en patrouille, rarement au-delà. C'était une zone excessivement dangereuse
plutôt réservée au CROQ (commando de renseignements et d'opérations de quartier)
basé à Bois Sacré, mais dépendant du secteur de Cherchell.
Ce n'était donc pas toujours évident de crapahuter "chez soi".
collection Deschler
SOUS QUARTIER DE BOU ZEROU
Poste de la 1ère Compagnie
Document J.C. Picolet
ZONE DE CHASSE THEORIQUE DE BOU ZEROU
La 1ère compagnie du 22ème R.I. s'est implantée au milieu de l'année 1957 sur un piton
au pied du K° Bou Zérou. On peut considérer que les travaux du camp se sont
Terminés en septembre 1957.
La région étant pauvre, il n'y avait aucun rassemblement de population sur place.
Comme elle était répartie sur les pentes nord et sud de l'oued Kébir, il a été décidé
de la regrouper sur la crête de Bou Zérou, d'où son nom. Mais il n'y a eu aucune
aide sur le plan des constructions. Chaque famille a dû se débrouiller.
Le GAD (groupement d'auto défense) de Bou Zérou a été créé le 16/03/1960
avec 30 fusils. Généralement moitié fusils de chasse, moitié fusils de guerre
récupérés sur les fellaghas, donc avec une grande diversité de types d'armes et de
munitions parfois difficiles à fournir. Et d'autant plus que nous ne distribuions pas
de cartouches de chasse. Elles étaient achetées par les GAD au "marché noir".
En complément nous livrions des fusils Lebel prélevés sur les stocks de la
"grande guerre", en parfait état, toujours dans "leur graisse d'origine" et les
les munitions de 8m/m étaient abondantes.
Collection Deschler
INSTALLATION DU CAMP DE BOU ZEROU
Le camp a été construit sur un piton de 4 niveaux. En bas à gauche une tour
de garde qui contrôle la montée. En face le djebel Bou Zérou, encore désert, sur lequel
sera construit, "ex nihilo", le regroupement.
collection Deschler
INSTALLATION DU CAMP DE BOU ZEROU
Le 59ème Bataillon du train au travail en mai 1957. Au fond, la tour d'entrée.
derrière les bulldozers, la place d'Armes avec à gauche les cuisines et réserves
et à droite, l'armurerie proche de l'entrée et la chambrée des harkis.
collection Deschler
CAMP DE BOU ZEROU
Vue du camp depuis la tour radio. Avec la tour de garde, niveau 1, qui, rapidement,
n'a plus été utilisée car hors du camp. Elle ne servait plus que pour abriter le
groupe électrogène en raison du bruit.
CAMP DE BOU ZEROU
L'escalier qui dessert les niveaux 2, 3 et 4.
BOU ZEROU LA PLACE D'ARMES
Le niveau 2 qui comprenait les chambrées de la troupe, les cuisines, l'armurerie,
Le poste de garde, le foyer et l'infirmerie. Ici, la cambrée des "appelés" et la boulangerie. Au dessus, le logement des officiers, niveau 3. A côté, dissimulés,
Ceux des sous officiers.
collection rené Deschler
BOU ZEROU
Le logement des officiers et l'escalier.
collection René Deschler
BOU ZEROU
Le logement des officiers niveau 3.
collection rené Deschler
BOU ZEROU
Le blason du 22ème R.I. D'une taille imposante (6 x 4 m), il était visible
à 10 Kms, dit-on !
Il était toujours en place en 1981.
collection René Deschler
BOU ZEROU
La tour sommitale qui abritait le poste radio et servait également de tour de garde
avec une vision circulaire de jour très importante. C'était le niveau 4.
collection R. Deschler
UN MOMENT DE DETENTE SUR LA PLACE D'ARMES
Derrière les joueurs, à gauche, l'armurerie juste à côté de la porte d'entrée du
camp et à droite, le bâtiment servant de chambrée aux harkis de la 3ème section.
collection R. Deschler
CAMP DE BOU ZEROU
Le boulanger en plein travail devant son fournil. Au dessus,
le bâtiment des officiers
collection J.C. Picolet
ZOHRA ET AÏCHA
Quelques familles sélectionnées de Bou Zérou étaient autorisées à récupérer
les restes de la cuisine. Des enfants, surtout des fillettes, venaient deux fois
par jour avec leur gamelle pour la distribution.
collection Jacques Duchadeau
L'ECOLE PUBLIQUE DE BOU ZEROU
La particularité de ce regroupement perdu dans le djebel était de posséder une
école à classe unique d'une cinquantaine d'élèves. L'instituteur était un civil.
Il vivait dans son propre baraquement situé en bas du camp et du regroupement.
contre paiement, il accédait au mess des sous officiers et au foyer.
collection J.Duchadeau
LE CLIMAT
Bien que situé à moins de 1000 mètres d'altitude et à 10 Kms à vol d'oiseau de la
mer, la région connaissait les chutes de neige, même si celles-ci étaient exceptionnelles.
La nuit du 7 au 8/01/1961, en poste sur un piton pour protéger le bureau de vote
de Bou Zérou lors du référendum sur l'autodétermination, j'ai vu tomber la neige.
ce qui n'est pas très agréable quand on n'est pas équipé pour.
Mais au lever du jour elle a fondu très vite.
La photo jointe à été prise à Bou Zérou durant l'hiver 1961/1962. La neige a
tenu quelques jours. Ce qui a donné lieu à de mémorables batailles
de boules de neige.
collection J.C. Picolet
LES GAD
Bouhamama, chef du douar et du GAD de Solaya
avec un harki originaire du village.
La compagnie contrôlait 5 GAD :
Bou Zérou, Tazzerout, Solaya et Beni Nador,
et Larioudrenne. Beni Ali, douar hostile, n'avait pas été armé.
D'ailleurs, il ne fournissait pas de harkis.
collection J.C. Picolet
LES GAD
Les GAD (on utilisait les mêmes initiales pour l'élément et les homes) de Solaya. L'effectif d'un GAD dépendait de la population "mâle résiduelle".
Mais pour une opération, ils pouvaient fournir jusqu'à 90 GAD soit l'équivalent
de l'effectif de la compagnie. Pour la quasi-totalité des harkis originaires des
douars de ces mêmes GAD…
collection J.C. Picolet
LES GAD
Un GAD de Solaya s'entraînant au tir. On faisait appel aux GAD au moins au niveau compagnie quand il fallait couvrir beaucoup de terrain en ratissage ou en bouclage.
En règle générale un jour, dans notre secteur, car ils se déplaçaient par leurs
propres moyens. Ils étaient rémunérés ; 6 NF par jour (salaire journalier d'un harki).
collection J.C. Picolet
LES GAD
Les séances de tir étaient fort rares. Dans ce cas, nous fournissions les munitions
et reconstituions les stocks. Les GAD s'entraînaient eux-mêmes. Comme
les harkis, ils étaient d'excellents tireurs avec une acuité visuelle remarquable.
Mais au posé, une position habituelle accroupie, non réglementaire, leur convenait
parfaitement.
collection J.C. Picolet
BOU ZEROU – L'ENVIRONNEMENT
Le piton "mythique" de 1040 vu de la piste
de Bou Zérou à Tazzerout.
collection J.C.Picolet
MECHTAS DE BOU ZEROU
Habitat traditionnel avant le regroupement. Cet ensemble à été maintenu en l'état
Car très proche du camp, dont on devine les barbelés en bas à droite,
Et du regroupement. Avec vue sur l'oued Kebir.
collection J.C. Picolet
TAZZEROUT
Vallée en amont de l'oued Bou Arbi entre Tazzerout et 1040.
Les habitants des mechtas isolées ont été "repliés"
sur le douar de Tazzerout.
Restent les plantations.
La cueillette se faisait sous protection de la compagnie.
collection J.C. Picolet
PISTE DE BOU ZEROU A TAZZEROUT
Sol désertique, plus rien ne pousse.
Du fait des différences de température
entre le jour et la nuit,
la roche devient friable.
On peut la creuser à la main.
collection Picolet
LA CELEBRE CÔTE en "Z"
DE LA PISTE DE BOU ZEROU A TAZZEROUT
Les virages sont si serrés que les GMC ne peuvent pas les prendre.
Un chauffeur émérite a trouvé la solution.
A la montée, le GMC avance jusqu'à la branche
Basse du Z. Puis monte en marche arrière.
Au second virage, il repart en marche avant.
C'est tout simple… mais impressionnant.
collection Jacques Duchadeau
SECTEUR DE BOU ZEROU
COUVERTURE VEGETALE
Dans le passé, le secteur était couvert de forêts.
Dans les années 60, les arbres avaient pratiquement disparus.
Il restait des broussailles qui gênaient la marche
et des arbustes insuffisants pour créer des zones de refuge.
Mais qui permettaient de se dissimuler lors d'un
passage d'un avion de reconnaissance ou de la "chasse".
collection J.C. Picolet
LA PISTE DE BOU ZEROU
A GOURAYA PAR TIGHRET
De droite à gauche : le commandant de compagnie,
Son chauffeur et moi-même.
C'est le radio qui a pris la photo.
En arrière plan, un autre exemple de végétation.
collection J.C. Picolet
LA PISTE DE BOU ZEROU A TIGHRET
Passage caillouteux au possible. Un civil dégage la piste après
un éboulement à gauche.
Les virages et certaines parties de la piste
sont contenus par des murs en pierres sèches.
Un camion, autre qu'un GMC, qui roule dessus
écroule le mur et part dans le ravin avec lui.
Comme le 02/06/61 juste avant le col en direction
de Tighret.
collection Georges Martineau
BENI ALI
Où, comment faire sa lessive quand on ne dispose que d'un quart d'eau
parce qu'on en manque cruellement puisqu'il
faut des jerricanes, deux brêles et une équipe de
harkis armés pour aller s'en procurer hors du douar.
En haut à gauche, l'arrière du marabout
qui nous abritait à notre arrivée.
collection G. Martineau
LE POSTE DE BENI ALI
La 2ème section a été envoyée à Béni Ali pour surveiller la construction du regroupement. Sans poste ni moyens pour se protéger, elle a d'abord occupé un marabout, puis une tente US, toujours à découvert. Pour ne pas être tiré comme un lapin de loin, de jour comme de nuit, elle a réquisitionné une mechta "fermée" assurant ainsi un minimum de sécurité.
IMPLANTATION DE BENI ALI
UNE ERREUR ?
NON, UNE FAUTE !
En septembre 1960, la 2ème section, composée de harkis, a été implantée à Béni Ali avec pour principale mission de surveiller et d'accélérer le regroupement d'une population particulièrement hostile à l'armée française. Dans des conditions de sécurité effroyables, même pas un petit barbelé de protection, cette section a en fait été clouée au sol. Tout était corvées : le ravitaillement fréquent à Tighret (2 heures de marche aller-retour avec 2 brêles), faute de moyens de conservation, corvée pour l'eau, pour le bois, pour tout… Avec protection en armes constante. Inaccessible par une voie carrossable, à au moins une heure de marche d'une piste, elle s'est retrouvée hors du monde, sans aucune possibilité opérationnelle puisque toute consacrée à ses propres problèmes d'intendance.
Et dans quelles conditions de sécurité ! Le chef de section ayant fait l'objet d'une EVASAN suite à une crise de péritonite, la section a été commandée pendant un mois par le second en titre, un "Appelé" avec le grade de caporal chef, ne pouvant s'appuyer que sur le seul autre "Appelé" de la section, le radio, lui-même caporal. Et ce pendant un mois. Sans que personne ne s'en émeuve à quelque niveau que ce soit.
Finalement, après moult tergiversations, en février 1961, il a été mis fin à cette mission stupide, pour ne dire démentielle. Les 1ère et 2ème sections ont été regroupées à Tighret et fusionnées afin de disposer, en fait, d'une harka toute consacrée aux opérations. Et enfin avec des résultats concrets.
Les "anciens" de la 2ème section qui se sont retrouvés récemment, se demandent encore et toujours, comment ils ont pu rester en vie dans de telles conditions. Ils ne peuvent que remercier leurs harkis, par ailleurs lâchement abandonnés en 1962 par un gouvernement sans scrupules.
A SUIVRE….
J.C. Picolet.